Bernaz Mion

Jean-Baptiste Bernaz/Jérémie Mion : “On a tout à apprendre”

Sortis déçus des Jeux de Paris 2024 – 12e en ILCA 7 pour le premier, 6e en 470 avec Camille Lecointre pour le second -, Jean-Baptiste Bernaz (37 ans) et Jérémie Mion (35 ans) ont annoncé cette semaine repartir sur une préparation olympique, cette fois en 49erTip & Shaft a échangé jeudi avec les deux marins.

▶ Revenons d’abord sur les Jeux, la déception a-t-elle été digérée ?
Jean-Baptiste Bernaz : C’était effectivement une grosse déception. Plus que sur le résultat en lui-même, elle était liée au fait de ne pas avoir planté le clou alors que j’étais en position de favori. J’étais au meilleur de ma forme, j’avais réussi à aligner tous les paramètres, c’est dommage d’être passé à côté. On est encore en train de débriefer pour en comprendre les raisons, il y a sans doute une partie psychologique, je pensais pourtant avoir fortement avancé dans ce domaine, peut-être que l’attente supplémentaire liée aux Jeux à la maison m’a sorti de ma zone de concentration, je ne vois pas grand-chose d’autre pour expliquer cette contre-performance. Maintenant, je digère cette frustration en me disant que ça reste un boulot à accomplir.
Jérémie Mion : Ça prend forcément un peu de temps de digérer. Maintenant, quand je regarde le projet dans son ensemble avec Camille, je ressens quand même de la fierté. En deux ans, on a réussi à faire des choses top, on a même redressé la barre sur les Jeux après un départ raté, le bilan reste globalement positif.

▶ Qu’est-ce qui vous a décidé à repartir dans une préparation olympique en 49er ?
Jean-Baptiste Bernaz : Il y a plusieurs facteurs : d’abord le fait qu’avec Jérémie, on s’apprécie beaucoup, on a passé beaucoup de temps ensemble en équipe de France. Ensuite, le 49er est un bateau qui m’attire depuis des années ; pour la petite histoire, j’avais navigué avec Morgan Lagravière il y a vingt ans, je n’avais plus eu l’occasion de m’y intéresser depuis, car je voulais vraiment aller au bout dans ma série. Aujourd’hui, je pense avoir fait le tour en Laser et je me dis que je suis mûr pour retourner à l’apprentissage, je me suis naturellement tourné vers Jérémie.
Jérémie Mion : Je me souviens que même après Rio (2016), JB m’avait un peu chauffé sur le sujet ! C’était alors sans doute un peu tôt pour se lancer, on en a reparlé plus sérieusement depuis quelques mois. Personnellement, j’adore me lancer des challenges, cela avait été le cas en 2021 sur la Transat Jacques Vabre qui m’avait sorti de ma zone de confort (3e place avec Cédric Chateau), là, ça sera la même chose, parce qu’on a tout à apprendre. Et humainement, je sais que ça va être une aventure géniale.

 

“C’est difficile de
se lasser des Jeux”

 

▶ Cinq préparations olympiques pour toi, Jean-Baptiste, trois pour Jérémie, vous n’êtes pas lassés ?
Jean-Baptiste Bernaz : Il suffit d’avoir fait les Jeux pour comprendre que c’est difficile de s’en lasser. C’est quelque chose qui a guidé toute ma carrière, les émotions sont énormes. J’ai beau les avoir disputés cinq fois, ça n’a jamais été jamais la même histoire, là, ça sera encore une tout autre histoire, ça me donne pas mal d’énergie. Et je peux te dire que pour l’instant, la lassitude, on ne la sent pas du tout… J’ai l’impression de retourner en Optimist quand j’avais 7 ans !
Jérémie Mion : Moi, c’est vraiment l’olympisme qui m’éclate. C’est sûr que c’est dur, ça implique des sacrifices, de la rigueur, mais tu vis des émotions que tu ne trouves nulle part ailleurs. Et avec ce nouveau défi, on ne peut pas se lasser car chaque minute qu’on passe sur le bateau, on apprend un nouveau truc, c’est du pain béni.

▶ Avez-vous demandé l’avis de la Fédération avant de vous lancer ?
Jérémie Mion : Oui, carrément. Avant même de mettre le pied sur le bateau, c’est la première chose qu’on a faite. Nous en avons parlé à Guillaume (Chiellino), notre DTN, avec Manu Dyen aussi (entraîneur en 49er), ils nous ont dit tous les deux qu’ils croyaient à ce projet, à la fois pour notre expérience commune sur d’autres supports et pour nos gabarits qui se prêtent bien au 49er. S’ils ne nous avaient pas soutenus, on se serait peut-être rapatriés sur nos supports respectifs.

▶ Quand avez-vous débuté et qui fait quoi ?
Jérémie Mion : On a commencé il y a deux semaines à Marseille avec Julien (d’Ortoli) et Noé (Delpech) qui viennent d’arrêter leur carrière sportive et sont dispos pour venir faire des heures avec nous, Mathieu Frei aussi. Le but pour nous est de gagner du temps en ne naviguant pas ensemble au début, mais en parallèle avec des spécialistes du 49er pour qu’ils nous expliquent ce qu’il faut faire et rattrapent nos erreurs. Plus tard, on mettra notre patte, mais pour l’instant, la priorité, c’est d’apprendre le fonctionnement du bateau.
Jean-Baptiste Bernaz : On a effectivement la chance de partir avec deux bateaux sur l’eau, Jérémie avec un bon barreur, moi avec un bon équipier, parce que c’est moi qui barrerai. Avant d’exprimer nos savoir-faire respectifs, il va se passer quelques mois, pour l’instant, on passe un peu de temps à nager, j’ai eu le droit à mon premier dessalage hier (mercredi) !

 

“Une chance d’avoir Erwan et
Clément comme concurrents”

 

▶ L’exemple réussi de Charline Picon et Sarah Steyaert, médaillées de bronze aux JO en 49er FX, qui était un nouveau support pour elles, vous a-t-il confortés dans votre choix ?
Jérémie Mion : C’est clairement inspirant, d’autant qu’on avait cette idée en tête avant qu’elles signent cette perf. Ça montre que c’est possible et ça pèse dans la balance pour convaincre la Fédé et nos partenaires de nous suivre.

▶ Quand est prévue votre première compétition ?
Jean-Baptiste Bernaz : On n’est pas encore très bien calés sur le sujet. Là, on va avoir deux mois intensifs, j’ai ensuite un projet familial de partir en Nouvelle-Zélande, je vais en profiter pour faire le Mondial de Moth. On va s’y remettre à fond à mon retour, je pense que notre première compétition sera la Semaine de Palma (fin mars 2025), avec pour seul objectif d’arriver à tourner entre deux bouées sans casser tous les bateaux autour !

▶ Sur la route des Jeux de Los Angeles, la concurrence française s’annonce relevée avec notamment les champions du monde Erwan Fischer/Clément Pequin, avez-vous mesuré cet aspect avant de vous lancer ?
Jean-Baptiste Bernaz : Je pense que c’est une chance de les avoir comme concurrents. J’ai vécu cinq campagnes olympiques, dont trois sans concurrence, que tu es du coup obligé d’aller chercher à l’étranger, ce qui pose d’autres problèmes. Nous, notre souhait est d’être le plus tôt possible opérationnels pour qu’on puisse s’entraider. Parce que ça ne nous intéresse pas de ne pas avoir de concurrence pour faire 15e aux Jeux. Et si on n’arrive pas à se qualifier et qu’on peut apporter notre pierre à l’édifice pour qu’ils décrochent une médaille, on sera aussi contents.

Photo : Nicolas Touzé

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