Après un Vendée Globe couronné d’une troisième place pour Louis Burton, l’écurie BE Racing a renouvelé son partenariat avec Bureau Vallée jusqu’à fin 2025 et conclu le rachat de L’Occitane. L’occasion pour Tip & Shaft d’échanger avec sa cofondatrice, Servane Escoffier, compagne de Louis Burton, qui a accepté de prendre un peu de temps sur ses vacances.
Comment s’est passé l’immédiat après-Vendée Globe pour vous ?
Il s’est passé beaucoup de choses ! Là, le nouveau bateau est en train de rentrer à Saint-Malo après avoir fait une première escale à Lorient, « BV2 » a été démâté et déquillé, l’inventaire de vente a été rédigé. A côté, nous avons lancé la sélection Espoir [le lauréat courra cette saison la Transat Jacques Vabre en Class40] avec Mer Entreprendre, dont les partenaires nous suivent en vue de la Route du Rhum 2022. Nous avons aussi un deuxième Class40 à la location et un Figaro pour lequel nous cherchons un sponsor, toutes les réunions pour la préparation de la saison 2021 sont calées, et là, on essaie d’être en vacances !
Avec un peu de recul, quel regard portes-tu sur votre campagne de Vendée Globe 2020 ?
On est forcément très heureux. Louis s’était mis en tête, sans le crier sur tous les toits, de faire un top 5, donc passer la ligne en deuxième position et terminer troisième, c’est juste magnifique. Sur quatre ans, comme dans la vie, on est passés par des moments difficiles, donc on essaie de savourer ! Ces campagnes de Vendée Globe demandent beaucoup d’expérience, tu en apprends tous les jours à tous les niveaux : dans le management avec les partenaires, la technique, la préparation du skipper, le suivi de la course sur trois mois… On va d’ailleurs se refaire un gros débrief sur les dix dernières années en rentrant de nos vacances pour voir quel cap prendre pour la suite.
La troisième place de Louis a-t-elle un petit goût de revanche par rapport à un milieu de la course au large dont vous avez toujours été un peu en marge ?
Non, nous ne sommes pas du tout revanchards. Nous regardons forcément ce qui se passe à l’extérieur, mais nous avons toujours fait notre propre route, sans cet esprit de revanche. Ça ne sert à rien, si ce n’est à te rendre malheureux et à te faire perdre de l’énergie.
Forcément, il va être plus regardé. Maintenant, je ne pense pas que ça le fera dévier de son ADN. En tout cas, nous avons tous reçu, et lui le premier, de très beaux messages de grands marins, ça fait extrêmement plaisir et c’est très motivant pour la suite.Parlons justement de la suite : vous avez vite rebondi, puisque Bureau Vallée a renouvelé le partenariat jusqu’à fin 2025, était-ce déjà dans l’air avant le Vendée Globe ?
Depuis le précédent Vendée Globe, nous avons la chance que le projet ne s’arrête pas juste après l’arrivée, mais après la Transat Jacques Vabre suivante. Mentalement, pour l’équipe, c’est un gros plus, parce que si tu sais que ça s’arrête une fois le Vendée Globe terminé, une partie de ton énergie est concentrée sur la recherche de la suite, tu te disperses. Et pour Bureau Vallée, ça permet de poursuivre les actions, notamment celles autour du kit pédagogique qui prend une grosse place dans le projet. Dès que Louis est rentré, nous nous sommes vus avec les dirigeants de Bureau Vallée pour leur proposer de repartir sur une nouvelle campagne. Même si l’on savait qu’en termes de communication, de retombées médias et d’activations autour du kit pédagogique, ce Vendée Globe avait été sublime, il y avait forcément des éléments internes à l’entreprise que l’on ne maîtrisait pas, donc on ne pouvait rien présager, c’est une chance incroyable de repartir pour cinq ans !Avec à la clé l’achat de L’Occitane, pourquoi ce choix ?
Au départ, nous avions trois options ouvertes : faire évoluer Bureau Vallée 2, lancer une construction ou racheter un bateau. L’opportunité de L’Occitane s’est alors présentée, il fallait se positionner très vite, les équipes juridiques de Bureau Vallée ont été très réactives pour ficeler le rachat.
A quel prix ? Et combien vendez-vous Bureau Vallée 2 ?
On ne communique pas le prix d’achat, mais c’est entre 4 et 5 millions d’euros. Pour BV2, la base de discussion est de 2,6 millions d’euros hors taxe. Nous avons déjà pas mal de prises de contact et nous recevons les premières visites.
Oui, nous sommes en phase de recrutement au niveau technique, nous cherchons une ou deux personnes. Forcément, cela va avoir un impact sur le budget de fonctionnement, je ne peux pas te donner un chiffre exact car ça va dépendre du programme, mais, depuis dix ans, on a toujours fait en sorte que les budgets restent raisonnables pour les sponsors. Je ne pense pas qu’on sera dans les top budgets, mais on aura vraiment les moyens de bien faire les choses.La première course sera The Ocean Race Europe, avec qui allez-vous la courir ?
Certainement avec nos anciens skippers Espoir, Arthur (Hubert) et Clément (Commagnac), mais on a aussi des propositions de marins qui envisagent de continuer ou de se lancer en Imoca et veulent voir comment est le bateau, nous sommes très ouverts à ça. Nous allons aussi proposer à l’architecte, Sam Manuard, qui a fait la première partie du convoyage avec Louis. Et je pense que je vais aussi faire une ou deux étapes. Je l’avais dit lorsque nous avions fait la Transat Jacques Vabre ensemble en 2017 : je ne suis pas forcément la meilleure co-skipper pour Louis, en revanche, j’ai vraiment la volonté de bien connaître le bateau pour mesurer les problématiques techniques qui pourraient se poser plus tard. C’est dans cet esprit que je vais essayer de naviguer sur le Tour de l’Europe.Et la Jacques Vabre ?
Non, ce ne sera pas moi la co-skipper. Rien n’est officiel aujourd’hui, mais Louis a deux garçons en tête.
Tu n’as pas envie de renouer avec la navigation en compétition ?
Aujourd’hui, je continue quand même à être sur l’eau, que ce soit sur l’Imoca ou sur le Class40 pour des entraînements, ne serait-ce que pour garder la main, mais ce n’est actuellement pas compatible pour moi de participer à des courses. Maintenant, je ne suis pas fermée, il ne faut jamais dire jamais, mais pour 2021, non, ce n’est pas au programme.
Photo : Jean Louis Carli / Alea