François Gabart a établi dimanche à 2h45 le nouveau record du tour du monde en solitaire en 42 jours 16 heures 40 minutes et 35 secondes. Derrière cet exploit, il y a bien sûr un skipper talentueux et un sponsor solide – qui investit chaque année 5 millions d’euros HT dans le projet -, mais aussi une équipe. Comme l’avait raconté Tip & Shaft à l’arrivée du Vendée Globe victorieux d’Armel Le Cléac’h, le rôle joué par les teams, de plus en plus structurés, devient désormais prépondérant dans la voile de course moderne. Tip & Shaft s’est donc intéressé à l’organisation mise en place autour de François Gabart avec son équipe de Mer Concept.
Créée dès ses débuts de coureur au large en Figaro, la société MerConcept (qui s’appelle en fait FG MerConcept) est longtemps restée une petite structure. A l’époque du projet Imoca, dont le maître d’œuvre était l’écurie Mer Agitée de Michel Desjoyeaux, elle permettait surtout au skipper de se rémunérer. C’est au moment du lancement du projet de trimaran Ultime que MerConcept a réellement pris son envol lorsque François Gabart s’est émancipé de Mer Agitée après sa victoire dans la Route du Rhum 2014. “François souhaitait simplement être maître de son projet”, explique Tiphaine Champon, bras droit du skipper. “La transition s’est faite facilement et nous avons continué à travailler avec Mer Forte [le bureau d’études co-créé par Michel Desjoyeaux, NDLR] sur la construction du trimaran”.
Ce changement d’organisation s’est du coup accompagné du transfert de plusieurs éléments de Mer Agitée vers MerConcept, à commencer par Tiphaine Champon, que Pauline Rivard-Maggiar, en charge du sponsoring à la direction de la communication de Macif, considère comme “la pierre angulaire” de l’ensemble. “Responsable projet”, cette ancienne de chez Kaïros est à la fois team manager et responsable des relations avec les partenaires et les fournisseurs. Elle est également la seule de MerConcept à travailler parallèlement pour la SAS François Gabart, qui gère les contrats d’image du Charentais.
A la même époque, d’autres anciens de Mer Agitée ont constitué le noyau dur de MerConcept. C’est le cas de Sébastien Gladu (ancien des équipes de Bernard Stamm et Jérémie Beyou), l’un des deux boat-captains du trimaran, et d’Antoine Gautier (ex Team Banque Populaire et VPLP), qui dirige le bureau d’études. Guillaume Combescure, ingénieur en charge notamment de la performance (et qui vient de terminer la Mini-Transat), Isabelle Magois, également passée par la Mini, ex de Grand Pavois Organisation et de l’équipe de Sam Davies, en charge de la logistique, et Nicolas de Castro, technicien réputé passé par de nombreuses équipes de course au large, sont également passés d’une structure à l’autre.
Au total, avec Fred Bérat, Benoît Piquemal, Vivien Fraisse, Pascal Dourlen, Erwan Le Meilleur, Corentin Chenais, Antoine Chartiez, Luis Guervos et Thomas Dagneau, MerConcept compte 19 salariés, soit l’une des plus grosses équipes de la voile française avec Banque Populaire et Gitana. La plupart de ses membres sont en CDI, à l’exception du petit dernier, Emilien Lavigne, jeune ingénieur-chercheur qui effectue sa thèse, et de deux CDD, Gwénolé Bernard et Stéphane Chatel, arrivés de Groupama Team France, qui travaillent sur les futurs nouveaux systèmes intégrés au trimaran lors du prochain chantier d’hiver. Le comité de direction, composé de François Gabart, Antoine Gautier, Nicolas de Castro et Armelle Guillou – la responsable financière, elle aussi ancienne de l’équipe de Roland Jourdain – tranche lorsqu’il s’agit de prendre des décisions importantes et de recruter. Mais le fonctionnement reste très horizontal : “Ils ont vraiment l’esprit start-up, avec des profils de poste clairement définis et un management super participatif. Ils ont su dénicher des jeunes talents et leur donner de la place pour grandir”, analyse Yannick Perrigot, qui dirige Windreport, l’agence chargée de la communication autour du projet Macif.
Au lancement du projet, François Gabart, novice dans ce rôle de chef d’entreprise, a fait appel aux services de la société Map & Match pour l’accompagner sur ces questions de management. “Il a toujours le souhait d’être dans le partage et le collaboratif, explique Margaux Grisard, PDG et co-fondatrice de l’entreprise, c’est important pour lui que ceux qui travaillent avec lui trouvent du plaisir dans ce qu’ils font ensemble“. Une démarche efficace lors de la construction du trimaran Macif, comme l’explique Philippe Facque, directeur général de CDK Technologies : “Ils ont une équipe avec des ingénieurs qui ont des idées tout le temps, cela permet de créer un vrai échange qui tire tout le monde vers le haut, ce n’est pas le chantier d’un côté et l’équipe de l’autre.”
Une véritable bande, qui n’a pas connu beaucoup de départs jusqu’ici. Directeur des Activités Mer chez Macif, Jean-Bernard Le Boucher souligne : “François ne sait pas travailler avec une équipe qui n’est pas proche de lui. Ce ne sont pas pour autant forcément des gens qui lui ressemblent, parce qu’il a besoin de profils complémentaires”. Une méthode plutôt efficace jusqu’ici.