La pandémie de Covid-19 conduit depuis deux semaines de nombreux organisateurs à chambouler leurs courses. Parmi eux, OC Sport Pen Duick qui a reporté (pour l’instant) la Transat AG2R La Mondiale et étudie différents scénarios pour The Transat CIC, mais se montre en revanche confiant pour la Solitaire du Figaro. Tip & Shaft s’est entretenu avec son directeur général, Hervé Favre.
Commençons par évoquer la Transat AG2R La Mondiale : où en est-on aujourd’hui sur cette course qui devait partir le 19 avril ?
Nous avons reçu la décision de la Fédération française de voile qui a étendu l’interdiction de tout événement nautique jusqu’au 3 mai, donc la course est officiellement annulée au regard du calendrier de la Fédération. Ce n’est pas une surprise et nous avions anticipé cette décision en annonçant il y a dix jours que la course ne pourrait pas avoir lieu à la date prévue. Maintenant, nous sommes en discussion avec la classe Figaro pour trouver une fenêtre dans le calendrier pour que la course ait lieu. Nous avons essayé de voir si nous pouvions en trouver une cette année, mais ça paraît compliqué. La fenêtre météo qu’on pouvait viser sur une telle transat était soit jusqu’à fin juin – mais ça n’est pas tellement une option vu la situation actuelle – soit après le 1er novembre, mais en face, il y a le Vendée Globe. Donc on se projette plus sur l’année 2021 : on travaille sur un scénario, mais comme il y a un calendrier déjà en place, il faut voir comment on peut l’aménager. Aujourd’hui, nous sommes donc dans cette phase de discussion avec la classe Figaro.
Au printemps 2021, il y a effectivement la Sardinha Cup et la nouvelle Med Sea Race au programme, c’est bien ça ?
Oui, exactement. Pour l’épreuve en Méditerranée, ça peut coller : cela s’est déjà fait part le passé d’enchaîner la Transat AG2R et la Generali Solo, donc c’est potentiellement envisageable. Ensuite, il y a effectivement la Sardinha Cup qui avait un programme assez ambitieux pour l’année prochaine ; on attend que la classe organise une discussion entre ses adhérents sur le sujet avant d’en discuter avec elle.
Quelle est la position du partenaire titre, AG2R La Mondiale, sur ce report ?
AG2R La Mondiale étant un partenaire majeur de la santé, au vu de la situation actuelle, nos interlocuteurs nous disent qu’ils ne peuvent pas prendre de décision sur une nouvelle date. Ils ont acté que la course ne partirait pas le 19 avril mais aujourd’hui, très clairement, ce dossier n’est pas leur priorité, ce qu’on peut très bien comprendre. La période est difficile pour toutes les sociétés d’assurances, spécialement pour AG2R La Mondiale qui a parmi ses clients un grand nombre de personnes âgées directement touchées par le coronavirus, donc ça serait vraiment très malvenu pour nous de les solliciter en ce moment.
Evoquons maintenant The Transat CIC : les choses ont-elles avancé depuis la semaine dernière ?
On travaille beaucoup sur le sujet. Nous sommes en pleine période de consultation avec la ville de Brest, les partenaires, en particulier le CIC, et les classes. Sur le principe, nous avons le soutien du CIC et de Brest pour faire un événement dans les meilleures conditions possibles cet été ou l’année prochaine. Mais pour faire une course, il faut les acteurs que sont les skippers et les bateaux. Donc l’essentiel des discussions se concentre là-dessus. Nous avons envoyé un sondage à nos quatre classes habituelles [Ultimes, Multi50, Imoca, Class40] pour savoir quelle serait leur préférence. Je pense que c’est la meilleure façon de procéder, on ne peut pas avancer tout seul et dire qu’on va faire telle course à telle date.
Quelle date butoir vous donnez-vous pour courir cette année ?
Aujourd’hui, on a besoin d’avoir au minimum à peu près six semaines de préparation avant de pouvoir lancer un événement, c’est une durée incompressible. Mais il n’y a pas que nous, il y a aussi les services techniques de la ville de Brest, on ne sait pas à quelle vitesse ils vont pouvoir se remobiliser. Il y a également les prestataires, par exemple ceux qui nous construisent le village, ils auront peut-être d’autres événements prévus, pas de tentes disponibles… On se dit aussi que le jour où le confinement va se terminer, on espère fin avril, les autorités ne vont pas forcément rouvrir les portes à 100% et autoriser des rassemblements de plus de 50 000 personnes. Donc aujourd’hui, on travaille sur un événement en été, mais on ne sait pas dans quel timing la situation va se stabiliser, il est donc très compliqué de donner des réponses. Tous les éléments qui doivent nous servir pour la prise de décision sont mouvants et changent d’un jour à l’autre. Et l’on se rend compte au fur et à mesure que des événements qui étaient prévus en juin et même en juillet ont d’ores et déjà été reportés – typiquement les Jeux olympiques, qui ont été reportés cette semaine alors qu’ils s’étaient au départ donné quatre semaines pour décider, ou Wimbledon qui se pose la question.
Sur quels scénarios de parcours travaillez-vous ? Une boucle Brest-Brest dans l’Atlantique ?
Oui, on s’oriente plutôt vers des parcours avec des îles ou un way-point virtuel à contourner, sachant que nous avions promis aux classes que les arrivées ne s’échelonneraient pas sur deux ou trois semaines. Ce qui signifie qu’on ferait des parcours différents en fonction des différentes catégories.
L’hypothèse de fusionner The Transat CIC et la Transat New York-Vendée-Les Sables d’Olonne (réservée à la classe Imoca) est-elle d’actualité ?
C’est quelque chose qui a en effet été évoqué. Aujourd’hui, on ne l’exclut pas, on se dit même que la meilleure solution serait de faire un gros événement plutôt que d’en faire deux. Mais l’Imoca nous dit que ce serait une solution très compliquée à mettre en œuvre.
Les Multi50, qui ne devaient pas participer à The Transat CIC, pourraient finalement être de la partie ?
Oui, on les a questionnés pour savoir s’ils étaient intéressés, mais ça reste compliqué, notamment pour les nouveaux skippers qui ne souhaitent pas faire de course en solitaire pour commencer sur le support. Et nous ne voulons pas changer le concept de The Transat CIC, la course restera en solitaire. Mais tout peut encore évoluer : imaginons que la Transat Québec Saint-Malo n’ait pas lieu – ce que je ne souhaite pas, bien sûr -, certains se diront peut-être qu’il vaut quand même mieux faire une course en solitaire, peut-être moins engagée que The Transat CIC originelle. Donc tout est encore ouvert.
Jusqu’à quand vous donnez-vous pour communiquer ?
On avait annoncé qu’on voulait prendre une décision fin mars, j’espère qu’on pourra s’y tenir. Mais comme je l’ai dit, les éléments sont tellement glissants que si l’on sent que nous n’aurons pas de réponses absolument sûres la semaine prochaine, on prendra un peu plus de temps.
Un report de The Transat CIC en 2021 est aussi envisagé ?
Oui, on travaille aussi sur ce scénario. Mais, là encore, le dossier est complexe, parce que les calendriers pour l’année prochaine sont déjà bien établis. Donc si c’est pour reporter d’un an mais se retrouver avec moins de bateaux, on n’aura rien gagné.
Parlons pour finir de la Solitaire du Figaro : le parcours est-il aujourd’hui bouclé ?
Oui, il l’est, nous l’avons annoncé au bureau de la classe Figaro. Mais je ne peux pas vous le dévoiler, nous allons communiquer dessus la semaine prochaine. C’est en tout cas la bonne nouvelle en ces temps difficiles, parce que tout le monde a évidemment envie de naviguer, vu il n’y a pas eu d’épreuves depuis le début de la saison. C’est vraiment important pour la classe Figaro de pouvoir proposer un bel événement, ça fait du bien de maintenir une course par les temps qui courent !
Le format est celui qui avait été envisagé : trois étapes classiques et une de sprint ?
Vous verrez si c’est toujours le cas, ce sera la surprise !
Vous êtes à la recherche d’un partenaire principal pour la Solitaire, la crise économique qui s’annonce va-t-elle rendre cette quête encore plus compliquée ?
Aujourd’hui, la crise sanitaire est évidemment celle qui nous préoccupe tous le plus, le nombre de personnes touchées et qui décèdent est terrible. Mais on va effectivement ressentir dans les prochains mois une crise économique qu’on a encore de la peine à imaginer. Si on regarde les précédentes crises, on sait que dans ces moments-là, les premiers budgets qui sautent sont le marketing et la publicité. Et que ça prend ensuite du temps pour redémarrer, un ou deux ans minimum. Donc, tout notre écosystème va être impacté, d’autant que notre modèle économique, pour les organisateurs comme pour les coureurs, repose en grande partie sur le sponsoring privé. Donc oui, ça va nous rendre la tâche d’autant plus difficile, il faut en être conscient. Après, il y a toujours des secteurs qui marchent bien, à nous d’être malins et d’aller vers eux.
Photo : Yvan Zedda
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