Boris Herrmann a été le premier la semaine dernière à officialiser son inscription en Imoca à la prochaine édition de The Ocean Race avec son projet Malizia, soutenu principalement par le Yacht Club de Monaco. Le skipper allemand, qui prépare cette saison la Transat Jacques Vabre avant le Vendée Globe en 2020, s’en explique à Tip & Shaft.
Peux-tu nous parler de ce projet de participation à The Ocean Race ?
Dès que la décision a été annoncée que l’Imoca devenait une classe pour The Ocean Race, je me suis dit que c’était une excellente idée et que j’allais tout faire pour y participer, parce qu’elle donne une possible suite à notre projet, une perspective à plus long terme que le seul Vendée Globe. Et je pense qu’il faut démarrer ce projet avant le Vendée, c’est beaucoup trop juste de se poser la question après. Il faut avoir une équipe qui se prépare pendant le Vendée. The Ocean Race correspond en plus à notre équipe qui, par les hommes et femmes qui la composent et par ses partenaires, est très internationale ; elle donne des opportunités complémentaires à celles du Vendée Globe et touche d’autres marchés, notamment l’Allemagne, où c’est une course connue, beaucoup plus que la Route du Rhum ou le Vendée Globe. Pour toutes ces raisons, on a décidé de s’inscrire, et maintenant, on travaille pour chercher des partenaires.
Qui sont aujourd’hui les partenaires qui te suivent dans ce projet ?
Aujourd’hui, notre partenaire principal pour le Vendée Globe est le Yacht Club de Monaco et nous avons aussi BMW et EFG Bank. Nous cherchons encore des partenaires complémentaires pour monter d’un cran dans notre potentiel de développement technique. Ensuite, nous aurons aussi besoin de partenaires pour ce projet The Ocean Race, en Allemagne bien sûr, mais aussi partout dans le monde. Aujourd’hui, on ne vit plus dans un monde où les projets sont 100% nationaux, notre équipe en est la preuve, puisque chaque membre a une nationalité différente : on a un boat-captain néo-zélandais, des techniciens irlandais et anglais, Ryan Breymaier qui est américain, Pierre Casiraghi monégasque… C’est la réalité dans laquelle on vit et souvent la réalité des entreprises. Et Malizia est un bateau qui appartient à un propriétaire allemand, moi, je suis allemand, basé à Hambourg, mais on se prépare en Bretagne et on est souvent à Monaco dont on porte les couleurs, c’est un vrai projet international. Au Yacht Club de Monaco, il y a 70 nationalités différentes.
Pour ton projet The Ocean Race, où en es-tu au niveau des personnes avec lesquelles tu souhaiterais travailler ?
Mon projet est d’avoir une dizaine de navigants qui tournent sur les différentes étapes, avec deux skippers. Je souhaiterais aussi avoir une égalité hommes/femmes, un thème qui est aussi important pour de nombreuses entreprises modernes. Aujourd’hui, c’est trop tôt pour annoncer une équipe, parce que nous ne sommes pas suffisamment avancés en termes de financement.
A combien estimes-tu le budget pour participer à The Ocean Race ?
Il y a un grand écart entre un projet de bateau neuf et un projet comme le nôtre qui est d’utiliser un bateau existant et éprouvé. Dans ma vision, j’estime le budget purement technique pour avoir un bateau fiable et performant à 8 millions d’euros (HT) minimum, sachant qu’il y a pas mal de travail à faire pour mettre le bateau en configuration équipage et qu’il faut débuter avant même le Vendée Globe pour que les modifications soient quasiment prêtes une fois la course finie.
Et quel est ton budget Vendée Globe aujourd’hui ?
Autour de 1,5 million d’euros par an ; pour l’année prochaine, le budget n’est pas encore bouclé, le but est d’arriver à 1,8 million.
Quelles modifications envisages-tu sur le bateau en vue de The Ocean Race (ex Edmond de Rothschild) et travailles-tu déjà sur le dossier ?
Oui, aujourd’hui, on travaille avec VPLP et Guillaume Verdier [les architectes du bateau, NDLR] sur les transformations qui ont déjà été faites et sur celles qui seront faites. Pour The Ocean Race, on n’en est qu’au stade de la vision mais on y réfléchit. J’ai en ce sens déjà navigué plusieurs fois sur le bateau à quatre ou cinq, en course et en convoyage. Je pense que ça serait bien d’avoir des barres à roue, d’enlever le moulin à café pour dégager de la place derrière le roof ; on a un cockpit très serré, mais si on l’allonge vers l’arrière, ça peut être pas mal pour travailler à quatre, ça peut se modifier sans trop se prendre la tête. Après, il y a le dossier foils, je pense que ça peut être intéressant de travailler avec d’autres équipes pour partager les coûts. L’objectif est pour moi d’avoir un bateau performant et surtout fiable, je pense que même sur un bateau existant, tu peux obtenir un bon résultat sur cette première édition, parce que certains vont arriver sans beaucoup d’expérience avec des bateaux neufs, c’est quand même un long chemin pour apprendre à connaître ces bateaux très compliqués. Donc sur cette édition-là avec un bateau existant, on peut encore être dans le match pour viser la première moitié de la flotte.
Avez-vous déjà discuté avec les organisateurs de l’éventualité de faire passer The Ocean Race par Monaco ?
Une escale, ça m’étonnerait, maintenant, il y a des discussions entre les organisateurs et Monaco, on a notamment proposé qu’un Ocean Summit de The Ocean Race soit organisé à Monaco, on a aussi discuté d’un prologue entre Monaco et Alicante, mais ce ne sont que des discussions.
Vous êtes les premiers inscrits, à ta connaissance, existe-t-il d’autres projets ?
Il y a des projets bien lancés, qui sont secrets, je ne sais pas trop pourquoi, mais je pense qu’il n’y aura pas de souci pour avoir une flotte respectable. Je suis en revanche étonné qu’il n’y en ait pas plus qui se positionnent déjà clairement, notamment parmi les skippers de l’Imoca. Peut-être qu’en France, The Ocean Race est encore vue comme une course assez chère, à laquelle le public français n’est pas aussi attaché qu’à l’international. Mais je n’ai pas de doute que des équipes vont venir.
Il y a un autre projet allemand, Offshore Team Germany, as-tu des liens avec eux ?
Non, c’est un projet différent, ils font les choses de leur côté, nous sommes concurrents, mais c’est parfait pour le sport et ça entretient une dynamique. Je crois d’ailleurs qu’ils lancent leur bateau vendredi à Kiel, c’est une bonne chose.
Finissons par la saison en cours : où en es-tu dans ta préparation de la Transat Jacques Vabre ?
Aujourd’hui, je suis en recherche d’un co-skipper, parce que Pierre Casiraghi a décidé de ne pas la faire, je voudrais trouver le plus vite possible pour commencer les entraînements à Port-la-Forêt juste après le Fastnet. Le profil idéal serait soit un figariste qui s’intéresse aux Imoca, de culture française, soit quelqu’un qui viendrait de la Volvo et utiliserait la Jacques Vabre pour mieux connaître le support.
Quel objectif te fixes-tu sur cette Jacques Vabre ?
Je voudrais déjà performer face aux bateaux de la génération existante, ensuite bien observer et apprendre ce qu’amènent les bateaux neufs, pour en tirer les conclusions pour Malizia. Est-ce qu’il faudra faire des nouveaux foils ou changer les formes des voiles ? Ça sera un bon test. Personnellement, je préfèrerais continuer sur le Vendée Globe avec ceux dont on dispose car, pour moi, la fiabilité est ce qu’il y a de plus important. Mais si les écarts sont trop grands, il ne faudra pas traîner.
Crédit photo : ©BMW-AG
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