11th Hour Racing a annoncé le 4 septembre sa participation à The Ocean Race 2021-2022 avec à sa tête Charlie Enright et Mark Towill, ce qui fait de l’équipe américaine la première équipe officiellement inscrite et financée en vue de la course autour du monde. Tip & Shaft profite de cette annonce pour faire le point sur les autres projets, en Imoca et en VO65.
Après deux campagnes sous les couleurs d’Alvimedica puis de Vestas 11th Hour Racing, le duo Charlie Enright/Mark Towill, associé au sein de la société 1 Degree, disputera donc pour la troisième fois consécutive The Ocean Race (ex Volvo), de nouveau avec l’organisation américaine de défense des océans 11th Hour Racing. Le projet est déjà dans les starting-blocks, puisque sur l’ex Hugo Boss, plan VPLP-Verdier deuxième du dernier Vendée Globe, il sera au départ du Défi Azimut puis de la Transat Jacques Vabre avec un duo composé de Charlie Enright et de Pascal Bidégorry (voir la liste des inscrits du défi Azimut), l’annonce officielle pour ce dernier étant prévue prochainement.
Autre annonce qui ne devrait pas tarder, en plus de celle faite le vendredi 6 septembre de l’arrivée au sein de l’équipe de l’Irlandais Damian Foxall en tant que « Sustainability manager » (comme lors de la dernière campagne), celle de la construction d’un Imoca spécialement dessiné pour The Ocean Race, plan Guillaume Verdier (VPLP ayant également été consulté) construit par CDK sous la maîtrise d’œuvre de l’équipe de MerConcept de François Gabart. Aucune des parties concernées, contactées par Tip & Shaft, n’a souhaité confirmer officiellement, mais des annonces sont prévues le 12 septembre.
11th Hour Racing sera donc le premier Imoca conçu et construit spécialement pour The Ocean Race. Pour Guillaume Verdier, ce n’est pas le seul projet en cours pour l’édition 2021-2022 de la course : selon nos informations, l’architecte, qui, à l’époque où Mark Turner dirigeait la Volvo Ocean Race, avait été chargé par ce dernier de plancher sur le dessin d’un 60 pieds one-design (projet abandonné suite au changement de propriétaire de la course), travaille également sur un autre Imoca pour le compte d’un projet baptisé « Switchback ».
Ce projet est porté par le Néo-Zélandais Daryl Wislang, vainqueur de la dernière Volvo avec Dongfeng Race Team, accompagné de Jules Salter (ex Team AkzoNobel), Pablo Arrante (ex Mapfre) et Simon Fisher (ex Vestas 11th Hour), une brochette de poids lourds de la course autour du monde. Le projet est soutenu par l’Américain David Leuschen, fondateur de Riverstone, un fonds d’investissement spécialisé dans l’énergie, par ailleurs propriétaire du Wally 100 Galateia, sur lequel navigue régulièrement Daryl Wislang. Joint par mail, ce dernier nous a répondu : “Je souhaite faire la prochaine course, mais je ne peux pas évoquer ce qu’il se passe en ce moment”.
Pour ce qui est des autres projets Imoca, le plus avancé à ce jour est celui porté par l’Espagnol Xabi Fernandez (voir notre interview en janvier), qui espère le feu vert de Mapfre (pour un budget que ses proches évaluaient en fin d’année dernière entre 20 et 25 millions d’euros, voir notre article) pour lancer la construction d’un Imoca dessiné par Juan Kouyoumdjian.
A l’étranger toujours, Offshore Team Germany a officiellement lancé sa campagne le 10 juillet sur l’ex Acciona de Javier Sanso autour du skipper allemand Robert Stanjek (Jörg Riechers, qui faisait partie de l’aventure, s’est retiré). Investissement de départ, pour lancer la structure, acheter et modifier le bateau : 3 millions d’euros, nous indique Jens Kuphal, manager du team allemand, qui estime le coût global de la campagne (des foils doivent être installés sur le bateau) “à 8-10 millions d’euros”. L’équipe, en recherche de partenaires, est également composée du Britannique Joff Brown (directeur technique, passé par Alex Thomson Racing), tandis que sont venus naviguer sur le Fastnet la Britannique Annie Lush (ex Team Brunel sur la dernière Volvo) et le Néo-Zélandais Conrad Colman.
Autre projet porté par un skipper allemand, Malizia, avec Boris Herrmann (voir notre interview), qui, lui aussi, cherche des partenaires pour l’accompagner à bord de son actuel 60 pieds à foils (ex Edmond de Rotshchild, plan VPLP-Verdier de 2015). Du côté de la Chine, Dongfeng Race Team, vainqueur de la dernière édition, ne repartira sans doute pas, mais selon nos informations, il n’est pas exclu de voir émerger un nouveau projet sous les couleurs chinoises, qui passerait par l’achat ou la location d’un 60 pieds existant. Enfin, The Mirpuri Foundation, déjà partenaire d’un VO65 pour the Ocean Race 2021/2022 (voir ci-dessous) et dont le patron, Paulo Mirpuri, a été vu récemment à Lorient, pourrait également s’impliquer dans un projet Imoca (voir l’article de Sail-World, information qui nous a été confirmée par plusieurs sources).
De leur côté, l’Australien Chris Nicholson (voir notre interview) et Nathalie Quéré, ex AkzoNobel, continuent à travailler sur une nouvelle campagne, portée par leur société créée en début d’année, W Ocean Racing. Le choix, qui dépendra du budget donc des partenaires trouvés, n’a pas encore été tranché entre Imoca et VO65, ils sont d’ailleurs actuellement en tournée promotionnelle en Europe avec The Ocean Race. “Les options restent ouvertes, nous confirme Nathalie Quéré. Nous avons joint nos efforts avec ceux de The Ocean Race pour leur European tour. Cette tournée est une belle plateforme pour promouvoir nos ambitions et rencontrer de possibles sponsors.” Quid d’une éventuelle nouvelle campagne d’AkzoNobel ? “Une décision d’AkzoNobel quant à leur éventuelle participation à la prochaine course n’est pas d’actualité pour le moment“, répond Nathalie Quéré.
Côté français, parmi les skippers qui avaient fait part de leur intérêt en fin d’année dernière, certains ont renoncé, comme Fabrice Amedeo, qui nous confie : “J’ai jeté l’éponge au printemps après avoir fait mes calculs : je me suis rendu compte qu’avec 8 millions d’euros, je pouvais prendre le départ, mais pour espérer mieux que juste participer, c’est beaucoup plus d’argent, le step était énorme par rapport à mon projet actuel, ce n’était pas compatible avec mon ambition de repartir sur une campagne pour le Vendée Globe 2024.”
Paul Meilhat, qui a annoncé son inscription début juillet, porte quant à lui un projet sur quatre ans avec la construction d’un plan Verdier et un budget évalué à 20 millions d’euros en tout, qui consisterait à enchaîner The Ocean Race, Route du Rhum 2022 et Vendée Globe 2024. Le tout sous une bannière environnementale fortement marquée, qui pourrait être celle de la Surfrider Foundation, dont le vainqueur de la dernière Route du Rhum en Imoca est l’un des ambassadeurs. “Cette partie engagement est de plus en plus importante, et si nous faisons un nouveau bateau, nous déploierons des actions concrètes, quitte à faire quelques compromis sur la performance”, explique Paul Meilhat qui cite en exemple la façon dont Lalou Roucayrol construit ses bateaux. Reste à convaincre des partenaires, ce qu’il n’a pas réussi à faire pour le dernier Vendée Globe. “De toute façon, je rencontre des gens intéressants et je fais parler de la cause, je crois que j’ai trouvé mon combat“, répond-il, déterminé.
Parmi les autres français, Thomas Ruyant, qui a mis à l’eau le 7 septembre son nouveau Advens for Cybersecurity (plan Verdier) samedi à Lorient, nous a confié étudier le dossier : “2021 étant une année un peu plus creuse, on se dit pourquoi pas ? Le fait qu’il y ait The Ocean Race me titille forcément, d’autant qu’on a un bateau qui pourrait assez facilement être adaptable à l’équipage, sans trop de modifications. Après, sous quelle forme, avec ou sans moi ? Tout reste ouvert“, explique le Nordiste. Qui sera à Alicante la semaine prochaine lors d’un “team meeting” pour prendre la température et cherche en priorité à boucler son budget pour le prochain Vendée Globe…
En ce qui concerne les VO65, les derniers mois ont été assez animés, puisque tous les bateaux ayant participé à la dernière édition ont changé de mains, ce qui nous a été confirmé par l’organisation de The Ocean Race. The Mirpuri Foundation, qui a officialisé sa participation en mars dernier, a fait l’acquisition du 65 pieds de Dongfeng dont le nom sera Racing For The Planet. L’ex Mapfre est désormais entre les mains de Sailing Poland ; l’ex Team SCA (qui n’a pas couru la dernière Volvo mais la précédente) est passé sous pavillon lituanien et s’appelle désormais AmberSail-2.
Propriété de Sailing Holland, l’ex Brunel – dont le skipper Bouwe Bekking nous avait confié en février son envie de remettre ça – participe actuellement au tour européen avec AkzoNobel – qui a gardé ses couleurs car “AkzoNobel a souhaité poursuivre son programme d’après-course”, selon Nathalie Quéré. L’ancien Vestas appartient désormais aux Autrichiens The Austrian Ocean Race Project, lancé mi-août et, l’ex Turn the Tide on Plastic courra The Ocean Race sous couleurs néo-zélandaises si Bianca Cook trouve des partenaires. Enfin, l’ex Scallywag a été cédé à un nouveau propriétaire qui reste pour l’instant confidentiel.
Des sources proches de la course ont également évoqué un projet mexicain ainsi qu’un français, mené par un skipper expérimenté… ce que l’intéressé nous a confirmé, tout en souhaitant garder l’anonymat. Tous ne seront sans doute pas cependant sur la ligne de départ en octobre 2021 à Alicante, car ils doivent réunir un budget de l’ordre d’une quinzaine de millions d’euros…