Class40 Xavier Macaire

Xavier Macaire : “sur le Rhum j’essaie de ne pas rêver à la victoire, mais de la construire”

Après onze ans sur le circuit Figaro Beneteau, Xavier Macaire s’est lancé en Class40 pour deux saisons avec son partenaire, le Groupe Snef, et un nouveau bateau à la clé, un Pogo S4 mis à l’eau en mars. Et un objectif prioritaire cette année, la Route du Rhum-Destination Guadeloupe, dont il sera l’un des grands favoris.

► Tu auras attendu 41 ans pour disputer ton premier Rhum, ça a été long ?
Oui, mais je n’ai pas vu le temps passer ! Et surtout, je ne me suis jamais vraiment focalisé là-dessus ; jusqu’à cette année, la Route du Rhum n’a pas été mon objectif, donc je ne peux pas dire que ça m’a spécialement manqué. J’ai commencé le Mini à 27 ans, mon objectif était alors la Mini Transat, que j’ai courue en 2009 (3e en série). Ensuite, je me suis lancé en Figaro et ça été la Solitaire, que je n’ai pas gagnée, mais j’ai quand même fait trois podiums. Et maintenant, j’arrive à la Route du Rhum, peu importe que ce soit à 40, 30 ou 50 ans.

► Cette course a-t-elle compté dans ton envie de faire de la course au large ?
Elle me faisait rêver dans le sens où je la suivais de près, mais je ne rêvais pas particulièrement de la faire. Je me souviens très bien de la victoire de Florence Arthaud, qui a marqué mon enfance, j’avais 9 ans, mais aussi des deux victoires de Laurent Bourgnon, dont j’étais fan quand j’étais petit. J’aimais bien son parcours, assez atypique, dans le sens où, avant d’être un compétiteur, c’était un aventurier et un passionné de la mer. Aujourd’hui, je me sens un peu comme ça : je suis d’abord un amoureux de la mer, la compétition est venue après. Quand j’ai commencé en Mini, c’était juste par passion, mon objectif premier n’était pas de faire carrière. Et comme les résultats sont vite arrivés – j’ai fait neuf courses en Mini, j’en ai gagné six et fait deux podiums – je me suis alors dit que je me donnais deux-trois ans pour devenir professionnel et ça a marché.

► Aujourd’hui, la compétition a-t-elle pris le pas ?
Je reste un passionné de mer, mais c’est vrai que je suis dans mon élément quand je suis en course, j’aime l’idée de me surpasser, de faire mieux que les autres avec les éléments et le matériel qui sont à notre disposition, c’est un challenge qui me plaît.

 

“J’ai proposé l’Ocean Fifty et le Class40”

 

► Après le Figaro, tu as donc choisi le Class40, cette classe s’est-elle imposée comme une évidence ?
Ça faisait deux ans que j’avais en tête cet objectif de Route du Rhum. L’année dernière, j’avais navigué en Ocean Fifty [avec Erwan Le Roux, NDLR], je me sentais prêt à relever le défi car c’est quand même engagé de faire du solitaire sur ce bateau. Donc j’ai proposé à Snef un projet en Ocean Fifty, mais également en Class40, qui me plaisait aussi car parce qu’on sentait, avec l’arrivée des scows, un regain d’engouement pour la classe et les bateaux sont assez extraordinaires. Chez Snef, ils m’ont dit qu’ils ne voulaient pas un projet trop onéreux, donc le Class40 s’est assez vite imposé.

► Tu navigues depuis avril sur ton Pogo S4 construit chez Structures, est-ce très différent d’un Figaro 3 ?
Oui, même s’il ne fait que 12 mètres, tu vois tout de suite que tu passes un step, qu’il se rapproche plus d’un gros bateau : il faut beaucoup plus anticiper, tu ne peux pas aller tout feu tout flamme envoyer tes manœuvres à l’avant quand il bombarde comme en Figaro, tu es obligé de ralentir. Sinon, les premières nav, dans 20-25 nœuds, j’ai vraiment eu une impression de puissance, de glisse, de vitesse, d’accélérations non-stop quand j’abattais. C’était assez agréable, même si c’est plus violent, parce qu’avec les formes en scow, les carènes sont très larges et plates. Du coup, ça tape forcément au près dans la mer formée, et comme le bateau est très raide structurellement, ça transmet tous les chocs au bonhomme. Et au portant, le bateau pousse de l’eau, enfourne un peu dans les vagues, il y a des coups de frein. C’est assez chaud, mais ce n’est pas quelque chose qui me freine, je me dis qu’il faut s’adapter.

 

“On est dix ou quinze très affûtés”

 

► Tu as remporté en juillet ta première course en solitaire en Class40, la Drheam-Cup, cette victoire te positionne forcément comme un des favoris de la Route du Rhum, te prends-tu à rêver de remporter la transat pour ta première ?
Non, j’essaie de ne pas rêver de la victoire, mais de la construire. Maintenant, j’assume le statut de favori, j’ai gagné la Drheam-Cup, donc c’est normal qu’on me dise que je fais partie des prétendants à la victoire. Après, plein de concurrents seront là pour la même chose que moi, mais c’est ça qui est chouette, c’est cette bagarre qu’on vient chercher.

► Peux-tu nous détailler les atouts de ton bateau et de tes concurrents ?
L’objectif de Guillaume Verdier et de Pogo Structures était de faire un bateau performant au portant en vue de la Route du Rhum, qui se court à 70-80% à cette allure, il a beaucoup cherché à optimiser la traînée, en la limitant au maximum, et ça marche. Chez Lombard [Yoann Richomme, Corentin Douguet…], ils ont plus misé le reaching et le près pour passer les premiers fronts, d’où une carène très puissante et un bouchain très tendu, avec beaucoup de couple de redressement. Quant au Max 40, le plan Raison de Ian Lipinski, d’Axel Tréhin et d’autres, c’est un bateau très polyvalent qui a un petit plus au portant dans la brise et la mer formée. Enfin, je trouve que le Mach 4 d’Antoine Carpentier est vraiment à l’aise dans le petit temps et le médium. Je pense que cette année, le plateau sera beaucoup plus homogène que lors de la précédente édition, où il y avait un très bon skipper avec un bateau plus puissant que les autres [Yoann Richomme, le vainqueur, NDLR]. Là, je pense qu’on est dix ou quinze très affûtés avec des bateaux qui ont des performances très proches.

► Finissons par évoquer l’avenir : tu continueras en Class40 en 2023 avec la Jacques Vabre dans le viseur, te projettes-tu au-delà et le Vendée Globe reste-t-il un objectif pour toi ?
Après la Route du Rhum, quand je vais me poser pour préparer ma saison prochaine et l’après 2023, évidemment que le Vendée Globe 2028 sera en haut de la pile, c’est une course que j’aimerais bien faire, mais je n’en suis pas là aujourd’hui.

Photo : Jean-Baptiste d’Enquin

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