Pierre Le Roy, vainqueur de la Mini Transat 2021

Pierre Le Roy : “Route du Rhum 2026 et Vendée Globe 2028, ce serait le timing idéal”

Vainqueur de la Mini-Transat 2021 sur son prototype TeamWorkPierre Le Roy repart cette année sur le circuit Mini, avec une rentrée sur la Plastimo Lorient Mini (départ jeudi 7 avril) aux côtés de son entraîneur Tanguy Leglatin. A 37 ans, “l’homme à battre” sur le circuit Mini, tel qu’il se définit lui-même, rêve d’Imoca avec un plan d’attaque bien établi.

Il y a deux semaines, Pierre Quiroga nous confiait les difficultés à digérer sa victoire dans la Solitaire du Figaro. Six mois après son arrivée en Guadeloupe, comment va Pierre Le Roy ?
Ça va pas mal, merci ! Il est certain qu’il y a une phase de redescente après ces grandes émotions. Je l’avais déjà vécu lors de ma précédente Mini [courue en série et terminée à la 5e place, NDLR] et c’est quelque chose auquel je m’étais préparé. Je savais notamment assez clairement ce que j’allais faire cet hiver, j’étais occupé, ce qui facilite les choses.

Avant de parler des projets, revenons à ton parcours qui semble aussi discret qu’efficace car tu as commencé la compétition sur le tard, n’est-ce pas ?
Oui, je n’ai jamais vécu au bord de la mer et j’ai découvert la voile pendant les vacances scolaires que je passais chez mes grands-parents à Saint-Malo. De fil en aiguille, je suis devenu moniteur de voile, mais sans jamais faire de compétition. La régate a commencé pour moi par l’habitable et le large, pendant mes études d’ingénieur en météorologie. J’ai passé un an à Melbourne, je me suis pointé au yacht-club du coin et j’ai trouvé un équipage pour faire des régates en baie ainsi qu’une traversée du détroit de Bass, ma première course en fait. Lorsque je suis rentré en France, j’habitais à Lille et j’ai commencé à courir avec l’équipage de Philippe Bourgeois à Dunkerque. C’étaient des amateurs très expérimentés, nous avons fait tout le circuit du Rorc, les Spi Ouest-France, Fastnet, ArMen Race… Après ça, je me suis senti paré pour faire du solo. En fait, c’est amusant, mais j’ai toujours été persuadé que la course au large en solitaire m’irait bien. J’en viens même à me dire que tout ce que j’ai fait en sport – beaucoup de foot notamment – me préparait physiquement à la confrontation avec le large. Et plus je me suis investi dans la course, plus j’ai aimé ça.

Tu dis souvent que tu as une méthode bien particulière pour t’entraîner. En quoi consiste-t-elle ?
Je ne pense pas avoir une méthode différente. Je m’entraîne depuis trois-quatre ans à Lorient avec Tanguy Leglatin, comme beaucoup d’autres ministes. C’est plutôt dans la gestion globale du projet que je me distingue : j’ai une approche très cartésienne des choses. Je réfléchis de manière scientifique pour savoir comment organiser mon projet, ma vie autour, j’essaie toujours d’identifier les points sur lesquels je dois progresser. Je suis très appliqué à faire les choses bien.

“Une seule année sur ce proto
était un peu court”

En quoi consiste ton travail à Météo France et comment t’organises-tu pour combiner vie professionnelle et compétition ? 
Je suis chef prévisionniste régional, basé à Villeneuve d’Ascq. Mon travail consiste à cadrer la prévision sur une grande zone Nord de la France. Je m’occupe de la sécurité civile et de la couleur de la vigilance à appliquer. C’est un travail d’encadrement, mais ça fonctionne très bien parce que j’ai des collègues qui sont très compréhensifs et qui me permettent d’organiser mon emploi du temps. Le dialogue avec Météo France m’aide beaucoup.

Tu rempiles cette saison sur ton Mini TeamWork, alors qu’après ta victoire, tu avais évoqué la piste du Figaro. As-tu changé tes plans ? 
Non, j’avais déjà pris la décision avant le départ de la Mini de continuer en 2022. Je trouvais que faire une seule année sur ce proto était un peu court car le plaisir à bord est vraiment incroyable et il y a au programme les Sables-Les Açores-Les Sables, que j’adore. Je vais moins naviguer en avant-saison, mais ça me permet d’avoir encore un support et de lancer la suite.

Et la suite, ça passe nécessairement par la case Figaro ou tu as d’autres envies ? 
Comme tous les skippers de course au large, je suis en recherche de projets, donc si un sponsor débarque avec un budget pour trois ans pour du Figaro, sans doute que j’y réfléchirai à deux fois. Mais mon ambition première, c’est la Route du Rhum et le Vendée Globe. Des courses où on est longtemps en mer, où les conditions sont plus dures et qui comportent de la stratégie et de la météo. Vu où j’en suis, et compte tenu du nombre de projets déjà lancés, le bon timing pour moi serait un Rhum en 2026 et, en fonction du bateau que j’aurai, un Vendée Globe deux ans plus tard. S’il se passe des choses avant, très bien, mais je ne voudrais pas me retrouver à faire une course en « one shot » avec un projet mal ficelé, ce n’est pas ma vision des choses.

Avec Teamwork, notre accord
porte uniquement sur le Mini”

Ton partenaire TeamWork pourrait-il te suivre sur ces projets ?
Avec Teamwork, notre accord porte uniquement sur le Mini. Ils sont engagés avec Niels Palmieri en Figaro. On s’entraîne d’ailleurs ensemble et nous devons faire une course en double cette année, mais je lui laisse le soin de l’annoncer. Peut-être que TeamWork développera d’autres projets, mais de mon côté, je me dois de chercher d’autres partenaires motivés sur de nouveaux formats. J’essaie notamment de trouver des opportunités pour naviguer en Class40 mais il n’y a rien de concret pour l’instant.

Quand on est vainqueur de la Mini-Transat, le téléphone ne sonne pas régulièrement ?
Le téléphone ne sonne pas du tout ! Mais ça, je le savais avant de partir. Je m’y étais préparé et je sais que c’est à moi de valoriser mes compétences. Je pense avoir des choses à raconter sur des sujets qui sont d’actualité. La météorologie, la prise de décision, le changement climatique, ce sont des sujets que je maîtrise. J’ai commencé à faire des conférences, ça permet de toucher de nouveaux publics et peut-être de rencontrer de nouveaux sponsors.

Dans le documentaire Option Sudvisible sur Sailorz, on voit bien ta détermination féroce pendant la Mini. En restant sur ce circuit cette année après ta victoire, n’y a-t-il a pas de risque de voir cette motivation s’émousser ?
Ce qui va changer, c’est qu’en amont, je ferai d’autres choses, je serai moins focus sur le projet Mini. Maintenant, je connais parfaitement le bateau, je sais que cette année, je suis l’homme à battre. Une fois en mer, quels que soient les résultats passés, je sais que je retrouverai cette niaque, j’aurai toujours cette envie d’aller au bout de ce que je peux faire.

Photo : Vincent Olivaud / Mini Transat EuroChef

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