En quelques années, l’ArMen Race a réussi à s’installer dans le paysage de la course au large française, principalement parce qu’elle n’avait pas d’équivalent lorsqu’elle a été créée en 2011. “La course est née sur une idée de Nicolas Groleau [patron du chantier JPS à La Trinité-sur-Mer, qui court sur le Mach 45 Bretagne Télécom, NDLR], qui trouvait qu’il manquait une course au large dans le calendrier de la SNT et sur la côte Atlantique, explique Antoine Croyère, président de la Société Nautique de La Trinité-sur-Mer. Nous avons alors réuni une dizaine de coureurs locaux pour y réfléchir, et, en deux heures, nous avions un nom, un parcours d’environ 320 milles qui irait jusqu’au phare d’ArMen, un format (double ou équipage), les types de bateaux et une date.”
Une date sanctuarisée, puisque depuis la première édition, le coup d’envoi de la course est donné le jeudi de l’Ascension sur un parcours qui, lui, évolue au gré de la météo. “Le parcours type, c’est d’aller virer deux bouées au large de l’Occidentale de Sein, de descendre pour contourner l’île d’Yeu avant de revenir vers La Trinité, explique le directeur de course, Hervé Gautier. Mais depuis que j’officie [cette édition 2019 sera sa quatrième, NDLR], on n’a jamais fait le même parcours”.
L’ArMen Race a rapidement rencontré son public, puisque de 88 bateaux participants sur la première édition, elle est passée à 203 en 2017, avant de se stabiliser autour de 180, “ce qui en fait la plus importante course au large sur les côtes Manche et Atlantique par le nombre de concurrents”, précise Antoine Croyère. Le gros de la flotte est composé d’amateurs éclairés courant en IRC et Osiris, avec, ces dernières années, une forte tendance à l’IRC double. Un phénomène que le patron de la SNT, qui courra lui-même en duo cette année à bord de son A35 Hey Joe, explique par deux raisons principales : “Il y a d’abord une dynamique Transquadra évidente, mais c’est aussi lié à la difficulté de monter un équipage. L’ArMen Race est une course exigeante, avec jusqu’à trois nuits en mer pour les moins rapides, ce qui nécessite une vraie organisation à bord avec un système de quarts, donc des marins assez aguerris.”
C’est justement pour répondre “à la demande de certains coureurs, en général peu entraînés, qui ne souhaitaient pas passer plus d’une nuit en course”, dixit le président de la SNT, que les organisateurs ont lancé en 2014 La Nuit de l’ArMen, petit parcours de 120 milles, qui rassemble aujourd’hui environ 20% des participants.
Côté professionnels, l’ArMen Race draine chaque année son lot de têtes d’affiche avec cette année trois Ultim inscrits (Actual Leader, Edmond de Rothschild, Sodebo), sept Imoca (ceux de Sam Davies, Manu Cousin, Arnaud Boissières, Damien Seguin, Fabrice Amedeo, Giancarlo Pedote et Romain Attanasio), la classe ayant inscrit la course à son programme parmi les courses d’exhibition, quelques Class40 et le Multi50 Solidaires en Peloton ARSEP de Thibaut Vauchel-Camus. Des têtes d’affiche qui permettent à l’épreuve de faire parler d’elle, même si, selon Antoine Croyère, le but principal n’est pas là : “Nous sommes une association, on n’a pas comme priorité d’avoir un rayonnement médiatique important, comme peuvent l’avoir les organisateurs privés qui ont besoin de ça pour attirer des partenaires. Nous devons certes équilibrer nos comptes, mais nous ne sommes pas dans une mission financière, notre objectif est en revanche d’avoir le plus de coureurs possible et qu’ils soient satisfaits.”
Le budget de l’épreuve se monte à 80 000 euros (TTC), principalement financé par les droits d’inscription, de 150 à 540 euros (voir l’avis de course), auxquels il faut ajouter 100 euros pour la balise de positionnement Yellow Brick. Uship, partenaire-titre depuis 2017, et quelques partenaires privés apportent une petite contribution, surtout pour la remise des prix. L’organisation, en plus du directeur de course Hervé Gautier, s’appuie sur une partie des 7 salariés que compte la SNT (voir ci-dessous), dont le président du comité de course, Gilles Bricout, une petite équipe média et une trentaine de bénévoles.
La SNT en bref. La Société Nautique de La Trinité-sur-Mer, qui fête cette année ses 140 ans, est le premier club de France en termes d’activité régatière, qui se calcule au nombre de bateaux/départs, il est vrai bien aidé par le Spi Ouest-France : “Cette année, nous avons eu 440 bateaux qui ont couru en moyenne 10 manches, ça fait 4 400 bateaux/départs. Mais à côté de ça, nous organisons beaucoup d’autres épreuves, comme les challenges de printemps et d’automne, qui réunissent souvent 50 bateaux le samedi et le dimanche sur 4-5 week-ends chaque saison, la Mini en Mai, La Trinité-Cowes, des régates corpo et de clubs…” A côté de cette partie organisation, la SNT, qui compte 7 salariés et regroupe 440 membres (120 euros la cotisation annuelle), fait office de club de sport (1 280 licences compétition), d’école de voile loisirs (1 400 stages d’une semaine l’été dernier) et scolaire.