Troisième en proto des Sables-les Açores-Les Sables en août, Jörg Riechers a pris samedi soir la deuxième place de la Duo Concarneau Challenge BFR Marée Haute avec François Jambou. L’occasion de s’entretenir avec le skipper allemand qui, à partir de l’année prochaine, naviguera en Imoca sur l’ancien Acciona, actuellement en cours de transformation. Avec l’intention, au sein de la structure Offshore Team Germany, de disputer le prochain Vendée Globe.
Tu navigues depuis deux saisons en Mini sur le scow Lilienthal (plan Etienne Bertrand), comptes-tu poursuivre sur le circuit ?
L’objectif de cette participation au circuit mini était de lancer le projet Offshore Team Germany sur le support le moins cher proposant des courses océaniques : donc l’idée était de faire la Mini-Transat (deuxième place en proto sur l’édition 2017), avant une année de transition en 2018 et la mise à l’eau du 60 pieds en 2019. Normalement, nous aurions dû anticiper cette mise à l’eau puisque nous devions faire la Barcelona World Race, mais comme elle a été annulée, on a continué à faire du Mini pour permettre au projet de continuer à exister et à moi de naviguer. J’en ai aussi profité pour commencer à former sur ce bateau Morten Bogacki, un Allemand qui a déjà navigué en Pogo 2, puisque c’est lui qui en prendra la barre l’année prochaine en vue de la Mini-Transat 2019.
Parle-nous du projet Offshore Team Germany, comment s’est-il monté ?
C’est un projet que nous avons lancé à deux avec Robert Stanjek. Après la Volvo Ocean Race 2014-2015, nous avons voulu créer un projet durable de course au large en Allemagne, avec des débuts en Mini, qui sert de déclencheur, puis le Vendée Globe en 2020 pour moi, la Volvo Ocean Race en 2020-2021 avec un équipage à forte dominante allemande dont il serait le skipper, sachant que nous sommes très complémentaires : moi, j’ai l’expérience du large, lui de l’olympisme, en laser et en Star. Robert a rencontré Jens Kuphal, un ancien producteur de musique, qui nous a aidés à faire passer le projet d’une simple idée à une vraie structure, lancée fin 2016. Nous avons ensuite acheté le 60 pieds, parce que ce n’est pas possible de donner de la crédibilité à un projet si tu n’as pas de bateau. Sinon tu vends du rêve, pas de la réalité !
Le bateau en question est l’ancien Acciona, quels travaux avez-vous faits dessus ?
C’est un bateau qui a un palmarès « infernal » : il a chaviré sur le Vendée Globe 2012, l’équipe et le management autour de ce bateau n’étaient vraiment pas bons. J’avais voulu l’acheter en 2014, mais ça n’avait pas été possible, parce qu’il y avait des problèmes d’assurance. Il a été finalement été disponible début 2017, nous avons sauté sur l’occasion et juste acheté la coque, sans mât ni quille, autour de 500 000 euros. Depuis, nous l’avons réparé et mis à la nouvelle jauge tout en modifiant le plan de pont, avec l’aide d’un des deux architectes du bateau, Merfyn Owen. Nous venons d’acheter un jeu de foils d’occasion d’un bateau qui a terminé en bonne place sur le dernier Vendée Globe [il ne nous dira pas lequel, NDLR] et pour le nouveau mât, nous hésitons entre un mât-aile avec outriggers et un mât à barres de flèches. Les travaux pour l’installation des foils vont commencer dans un mois au chantier Trimarine, au Portugal, pour une mise à l’eau fin février. Après la Transat Jacques-Vabre 2019, nous aurons une nouvelle paire de foils, dessinés par Martin Fischer, et une nouvelle étrave.
C’est donc un projet sportivement ambitieux, qu’attends-tu de ce bateau ?
Selon moi, il a un gros potentiel : c’est un bateau très étroit – 5,52 mètres, soit la même largeur qu’Hugo Boss – et comme il a été construit avant la jauge de 2016, le mât est libre, il n’est pas monotype. Pour moi, quand il aura les nouveaux foils de Martin Fischer, il ira plus vite que les bateaux de la génération 2016. Et dans certaines conditions, il pourra aussi « énerver » ceux de 2020 !
Tout ça a un prix, qui paie ces travaux et quel est le budget de ton projet de Vendée Globe ?
Ce sont deux investisseurs qui paient ces travaux : Jens Kuiphal et Michael Sampers, c’est un investissement qu’ils comptent récupérer à la vente du bateau. Maintenant, il faut trouver un budget de fonctionnement que j’évalue à 2,8 millions d’euros en tout. Pour un projet qui peut viser les cinq-six premières places au Vendée Globe, c’est correct.
Où en es-tu concrètement ?
Nous avons trois pistes très avancées, nous essayons de faire un projet avec plusieurs partenaires, je suis sûr et certain que nous allons y arriver.
Tu n’es pas le seul à vouloir participer au Vendée Globe, ne crains-tu pas de ne pas pouvoir te qualifier, sachant que tu ne cours pas la Route du Rhum (s’il y a plus de 30 concurrents ayant satisfait aux règles de qualification, ceux qui auront couru le plus de milles sur les courses des Imoca Globe Series auront la priorité) ?
Non. À chaque édition du Vendée Globe, c’est toujours la panique, mais, à la fin, des projets ne voient pas le jour ou ne vont pas au bout, alors je ne pense pas qu’il y ait un grand danger. Si nous participons au printemps prochain à la course de Valence [course en Méditerranée choisie par l’Imoca suite à l’annonce de l’annulation de la Barcelona World Race, NDLR], j’ai calculé que je serais 23e ou 24e en nombre de milles, ce qui me permettrait d’être sélectionné. Donc il faut que je fasse la course à Valence – avec forcément moins d’objectifs de performances, parce que la priorité sera de terminer. Mais je ne suis pas inquiet sur ce plan-là : si on regarde le nombre de courses que je n’ai pas finies, que ce soit en Mini, en Class40 ou en Imoca, il est très faible. Je ferai ensuite le Fastnet et la Transat Jacques-Vabre avec Robert Stanjek.
Après le Vendée Globe, l’idée serait de courir la Volvo Ocean Race sur le même bateau ?
Oui, l’objectif est de faire la Volvo sur ce bateau avec Robert comme skipper et un équipage surtout allemand, je pense notamment à Boris Herrmann – avec qui j’ai échangé sur le sujet – ou Isabelle Joschke. Mais nous ne sommes qu’au début du projet Volvo, nous attendons encore de connaître le parcours et l’avis de course.