Comment Violette Dorange a rejoint le projet Initiatives Coeur

Trois jours après son arrivée triomphale aux Sables d’Olonne, Violette Dorange, 25e du Vendée Globe, a été officiellement engagée comme co-skippeuse de l’Imoca Initiatives Coeur de Sam Davies pour la saison 2025. Tip & Shaft vous raconte comment s’est conclue cette opération.

Il n’aura pas fallu longtemps à Violette Dorange (23 ans) pour rebondir sur son premier Vendée Globe, terminé dimanche 9 février devant plus de 50 000 spectateurs : dès mercredi, les teams Initiatives Cœur et DeVenir ont en effet annoncé que Sam Davies et Violette Dorange seraient associées en 2025 à bord de l’Imoca de la première, plan Manuard mis à l’eau en 2022.

Pour comprendre la genèse de cette annonce, il faut revenir plus de huit ans en arrière, comme le raconte Arnaud Dorange, père de la navigatrice : “J’ai rencontré Jean-Michel Nizet (directeur de la communication du projet Initiatives Cœur) en 2016, juste avant leur deuxième Vendée Globe avec Tanguy de Lamotte, parce que je voulais comprendre comment fonctionnait ce projet qui mettait en avant une cause, plus que des partenaires.”

Les deux hommes sympathisent, se revoient régulièrement au départ des courses, tandis que Violette Dorange apprend à connaître Sam Davies au pôle Finistère de Port-la-Forêt, naviguant même au printemps dernier sur son Imoca lors d’une sortie d’entraînement. “Sam fait partie des femmes qui ont donné envie à Violette de se lancer dans la course au large, explique de son côté Sarah Claudel, en charge de la communication et des partenariats de DeVenir. Elle s’est aussi inspirée du modèle Initiatives Cœur dans sa façon de monter ses projets.”

Le projet DeVenir aura pour autant été loin d’être un long fleuve tranquille pour la skippeuse et son entourage, avec un budget global très serré d’environ 2 million d’euros (et encore déficitaire d’environ 200 000, nous précise Arnaud Dorange). D’où l’ambition affichée par l’équipe – les franchisés McDonald’s n’ayant pas l’intention de poursuivre après le Vendée Globe – d’anticiper au mieux la campagne suivante, comme le confirme Sarah Claudel : “L’idée, après ce projet plutôt aventure, était de revenir dans quatre ans avec un projet plus performant. Comme Violette a vraiment lutté pour trouver des partenaires, on a beaucoup échangé avec elle avant son départ pour savoir comment elle imaginait la suite, elle nous a donné ses lignes directrices, la priorité étant de trouver d’autres partenaires et un bateau à foils de dernière génération.”Ce travail incombe en partie à Arnaud Dorange, qui explique : “Avant le départ du Vendée Globe, j’ai fait le tour des écuries pour savoir quels projets allaient continuer, quels bateaux allaient être mis en vente pour éventuellement en acheter un si on trouvait un partenaire et quelles opportunités pouvaient se présenter pour un rôle de co-skippeuse pour la Transat Jacques Vabre.” Cette liste dressée, il se met, sitôt sa fille partie des Sables d’Olonne, à sonder quelques équipes sur leurs futures intentions. Il discute notamment avec MACSF, à la recherche d’un-e successeur-e à Isabelle Joschke, – “C’était un super projet”, commente-t-il -, avant de se décider à passer un coup de fil à Jean-Michel Nizet.

“Au départ, c’était vraiment un appel informel, et finalement, je lui ai demandé s’il y avait une opportunité pour rejoindre l’équipe en 2025. On a dû mettre trois minutes et demie pour s’accorder sur le fait que ce serait génial, pour plein de raisons, et notamment une vision commune à propos de nos deux causes respectives, assez liées, autour de l’enfance. Il a alors fallu poser la question à toutes les personnes concernées, Sam et Violette en premier lieu, le team manager d’Initiatives Cœur David Sineau et bien évidemment les partenaires.”

Quelles ont été les réactions ? Sam Davies, qui nous a fait savoir qu’elle souhaitait “s’en tenir à ce qu’elle a dit dans le communiqué de presse”, s’est montrée “tout de suite favorable”, selon Franck Vallée, CEO d’Initiatives, l’un des trois partenaires du projet (avec Vinci Energies et K-Line), tandis qu’Arnaud Dorange explique : “Quand j’ai eu Violette pour lui en parler, elle pleurait de joie. Pour elle, c’était le graal, Sam, c’est une de ses idoles de voile. Elle avait un tee-shirt Roxy dédicacé quand elle était petite ; d’ailleurs, on n’arrive pas à le retrouver !”Même accueil positif de la part de David Sineau : “C’est d’abord cohérent par rapport aux valeurs du projet, mais également, d’un point de vue sportif, parce qu’on n’est pas dans le cas de figure où on vient de mettre un bateau neuf à l’eau et on a besoin d’un skipper expérimenté pour nous apprendre à le prendre en main. Là, Sam connaît parfaitement son bateau, elle est plus dans une logique de transmission de son expérience.” 

Quant aux partenaires, ils ont également très vite adhéré : “Quand Arnaud nous a dit que Violette adorerait faire une Jacques Vabre avec nous, on a tout de suite trouvé l’idée intéressante et en moins de 24 heures, on s’est mis d’accord pour répondre favorablement”, confirme Franck Vallée. Une rapidité de la décision, qui, selon Arnaud Dorange, a “clairement fait la différence”, ce dernier ajoutant : “On a tellement galéré et connu des ascenseurs émotionnels sur cette campagne, avec des oui qui devenaient des non, que quand Initiatives Cœur nous a répondu OK au bout de deux-trois jours, on n’a pas fait la fine bouche.”

La décision est validée mi-décembre, mettant notamment fin aux espoirs de MACSF d’attirer Violette Dorange. Sollicitée par Tip & Shaft, le groupe mutualiste s’est montré beau joueur, indiquant : “Nous sommes ravis pour elle et fiers de voir des jeunes femmes poursuivre leur aventure dans la voile. De son côté, la MACSF, sponsor fidèle et engagé dans la course au large, souhaite poursuivre le sponsoring voile et étudie les options qui s’offrent côté bateaux et skippers en vue du Vendée Globe 2028.”Le Vendée Globe 2028, parlons-en : Sam Davies ayant annoncé aux Sables que l’édition 2024 serait sa dernière, Violette Dorange lui succédera-t-elle dans quatre ans sous les couleurs d’Initiatives Cœur, ce qui serait la suite logique de l’association entre les deux navigatrices cette année ? “Peut-être, répond Franck Vallée, mais il faut déjà voir si le projet va perdurer dans le temps. Personnellement, je l’espère, mais vous savez comme moi qu’il y a des enjeux purement financiers qui sont au-delà de l’envie, on a des réunions en mars sur le sujet, à chaque jour suffit sa peine.”

Même prudence de la part du clan Dorange : “Ça serait difficile de dire non [à une éventuelle proposition en vue du Vendée 2008, NDLR], commente le père. On va déjà voir comment se passe l’année, chaque chose en son temps et ça ne serait pas très correct vis-à-vis de Sam, engagée jusqu’à fin 2025 avec Initiatives Cœur, de mettre la charrue avant les bœufs.” Tout va donc se décider dans les prochains mois, mais une chose est certaine : vu le retentissement de l’arrivée de Violette Dorange, présente cette semaine dans tous les grands médias nationaux, la benjamine de l’édition 2024 devrait avoir moins de mal – si besoin était – à trouver des partenaires pour remettre ça en 2028.