Ambrogio Beccaria Imoca

Comment Ambrogio Beccaria a lancé son projet Imoca ?

Ambrogio Beccaria a officialisé mercredi 2 avril le lancement de son projet Imoca, soutenu par un nouveau partenaire titre, le groupe chimique italien Mapei. L’Italien, passé avec succès par la Classe Mini et la Class40, s’appuiera en 2025 sur l’expertise de TR Racing et de Thomas Ruyant, qui lui cédera à l’été la barre de l’Imoca Vulnerable. Ce dernier cherche de son côté de nouveaux partenaires pour l’accompagner dès 2026. Tip & Shaft vous en dit plus.

Et un nouvel entrant dans la classe Imoca en vue du Vendée Globe 2028 ! Après Elodie Bonafous, Francesca Clapcich et Loïs Berrehar, Ambrogio Beccaria a dévoilé mercredi à Milan les contours de son projet Imoca qui s’appuiera sur un nouveau partenaire titre, Mapei. Fondé à Milan en 1937, le groupe familial italien, un des principaux fabricants mondiaux de produits chimiques pour le BTP, qui affiche 4,2 milliards d’euros de chiffre d’affaires, s’est fait connaître dans le sport à la fin des années 1980, sponsor de l’équipe cycliste du même nom, avant de se lancer dans le foot, en rachetant en 2002 le club de Sassuolo.

Sa connexion avec la voile ? Une forte appétence de la part de ses dirigeants et notamment de Simona Giorgetta, membre du conseil d’administration, qui a découvert ce sport lorsqu’elle avait une vingtaine d’années. “Je suis une vraie passionnée, notamment de course au large. J’ai beaucoup suivi Giovanni Soldini dans ses différents projets et les figures mythologiques de la course au large comme Eric Tabarly, j’ai lu beaucoup de livres et je suis une grande fan de Jean Le Cam !” C’est en suivant l’actualité de la voile, et notamment de la Mini Transat, que cette dernière a découvert Ambrogio Beccaria, après sa première Mini Transat, en 2017.

“Je me suis dit qu’il fallait que je rencontre ce gars qui, en plus, était de Milan. Il se trouve que sa chargée de presse était une de mes meilleures amies, je lui ai demandé de nous présenter et c’est comme ça que nous avons commencé à discuter”, poursuit Simona Giorgetta. Les premiers échanges ne débouchent pas pour autant : “Il nous avait sollicités pour sa deuxième Mini Transat (qu’il gagnera en série, en 2019), mais c’était trop tôt pour nous, mon oncle (Giorgio Squinzi, qui a dirigé l’entreprise entre 1984 et sa mort, en 2019) était malade et nous étions accaparés par le club de foot”, indique la dirigeante. Qui ajoute : “Ambrogio m’a ensuite contactée pour compléter son budget pour son projet de Class40, pour lequel il avait trouvé Pirelli comme partenaire titre, on s’est dit que c’était une bonne idée de commencer en étant partenaire complémentaire, ça nous permettait de voir comment ça se passait.”

Mapei se décide à franchir le pas

Le skipper transalpin va vite combler ses partenaires, puisqu’à la barre d’Allagrande Pirelli, nouveau Musa 40 signé Gianliuca Guelfi, il va truster victoires et podiums en trois saisons, remportant notamment la CIC Normandy Channel Race, la Transat Jacques Vabre et la Transat CIC. “Ça a été une grosse réussite pour lui d’un point de vue sportif, mais aussi pour nous, on a engagé nos filiales dans tous les endroits où les courses sont allées, notamment en France et au Canada, nous avons organisé des événements avec nos clients qui ont été très appréciés”, constate Simona Giorgetta.

La suite ? C’est le marin qui la raconte : “Après ces trois années, je n’étais pas forcément hyper emballé à l’idée de repartir avec le même bateau, d’autant que ça me semblait difficile de refaire un cycle aussi réussi. A côté de ça, je me disais que si je voulais faire le Vendée Globe une fois dans ma vie, c’était le moment : je suis super motivé et encore jeune (33 ans), je n’ai pas d’enfants…” Le Milanais vend alors son Class40 et présente son projet à Pirelli qui, engagé sur d’autres fronts (notamment sur la Coupe de l’America avec Luna Rossa), lui répond qu’il ne peut pas suivre financièrement.

Il va donc trouver Mapei qui décide de franchir le pas : “Nous nous sommes dit que c’était le moment de l’accompagner jusqu’au Vendée Globe, confirme Simona Giorgetta. Pour une multinationale comme la nôtre, présente dans 57 pays, ce projet est d’abord l’occasion d’augmenter notre présence internationale ; il doit aussi nous permettre de mettre en avant notre côté “sustainability”, un domaine dans lequel mon oncle a commencé à travailler dès les années 1970, avant même que ce mot n’existe. Ambrogio est lui-même très engagé dans ce domaine, au point qu’il refuse de prendre l’avion pour venir deux jours en Italie !” Le budget de cette campagne de quatre ans ? “Il n’est pas complètement fixé et pourrait évoluer en cours de route, mais c’est un bon budget pour arriver à cet horizon Vendée Globe, répond cette dernière.

Il permet en tout cas à l’Italien de démarrer son projet dès cette saison, lui qui n’a pas envisagé l’hypothèse d’un bateau neuf : “Comme je n’ai pas d’expérience de l’Imocaje ne me voyais pas tout construire de zéro et ça me paraissait compliqué de proposer à un sponsor d’investir autant d’argent pour ne pas naviguer pendant deux ans. La meilleure idée était donc d’acheter un bateau de dernière génération.”

Alexandre Fayeulle prend du recul
mais reste engagé

Il entre pour cela en contact l’été dernier avec TR Racing, l’équipe de Thomas Ruyant : “Le plan de départ, c’était de louer un an le bateau de Sam (Goodchild, plan Verdier mis à l’eau en 2019) et de racheter celui de Thomas en fin d’année. Au final, ils sont revenus vers moi avec une autre proposition.” En l’occurrence celle d’incuber en 2025 au sein de TRR le projet italien, permettant une transmission de savoir entre les deux skippers, mais également du plan Koch Finot-Conq du Nordiste, puisqu’il changera de main dès l’été prochain. “Pour nous, c’est vachement mieux, on n’a pas à changer de bateau en cours de route et on bénéficie pour la prise en main du bateau de l’accompagnement de TRR et de Thomas qui va avoir un rôle de mentor, se félicite Ambrogio Beccaria. Ça va aussi me permettre de construire mon équipe petit à petit pour être capable de marcher tout seul en 2026.”

Ce changement de stratégie de la part de TR Racing s’explique en bonne partie par la décision de son cofondateur, Alexandre Fayeulle, président d’Advens, de prendre du recul en tant que partenaire titre du projet Imoca de Thomas Ruyant dès cette année. Une décision que l’entrepreneur, joint ce vendredi par Tip & Shaft, confirme : “L’année dernière, avec Thomas, on a décidé de diversifier les partenaires de TRR afin que la structure ne dépende plus que d’une seule personne, en l’occurrence moi. J’ai en outre la volonté de recentrer mes investissements sur mon territoire de Boulogne-sur-Mer, notamment sur des projets agricoles, et sur Vulnerable.org. Le Vendée Globe a été un super tremplin pour ce projet, mais c’est un projet à vocation nationale, il a moins de raison d’être sur un programme The Ocean Race, qui fait partie de l’objectif de Thomas. Je me suis dit que c’était le moment de passer le témoin.”

Pour Thomas Ruyant et son équipe, le fait d’héberger sportivement et techniquement le projet d’Ambrogio Beccaria en 2025 permet d’amortir ce départ, mais aussi de prendre le temps de trouver des partenaires pour 2026“L’opportunité d’accompagner Ambrogio était intéressante, car c’est effectivement une fin de cycle, on va vivre une année de transition, explique le vainqueur de la Route du Rhum 2022. Avec Advens, on a fait trois Vendée Globe ensemble, dont deux en tant que partenaire principal, ils ont permis à l’équipe de monter en gamme et de se doter d’un outil de travail incroyable qu’on a construit ensemble. Ce sont de gros atouts pour la suite et une opportunité forte pour d’éventuels nouveaux partenaires pour le cycle 2026-2029.”

D’autant que TRR disposera au printemps 2026 d’un Imoca neuf (plan Koch construit chez CDK), dont Alexandre Fayeulle sera d’ailleurs propriétaire. Je reste très engagé auprès de Thomas, déjà en tant qu’actionnaire fondateur de TR Racing, ensuite parce qu’Advens est partenaire technologique du projet, enfin parce que je suis armateur du futur bateau”, confirme ce dernier.

En attendant de recevoir ce nouvel Imoca, c’est donc sur son actuel, qui deviendra Allagrande Mapei en juillet, que Thomas Ruyant va courir cette année aux côtés d’Ambrogio Beccaria, avec au programme la Course des Caps, en juin, The Ocean Race, en août/septembre, et la Transat Café L’Or, fin octobre. “C’est chouette de relancer une dynamique similaire à celle qu’on a eue avec Sam sur le cycle précédent, d’autant que, par la suite, si Ambrogio aura sa propre structure, elle sera hébergée dans les locaux de TR Racing. L’idée sera de continuer à naviguer ensemble, à deux bateaux.” Et si Thomas Ruyant trouve des partenaires, il laissera peut-être une place à bord pour l’Italien sur une ou quelques étapes de The Ocean Race 2027, qui ne figure pas au programme d’Allagrande Mapei.

Photo : Anne Beaugé 

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