Ce jeudi à Göteborg, siège du constructeur automobile suédois propriétaire de la course, la Volvo Ocean Race a donc annoncé les principales évolutions de l’épreuve pour la prochaine décennie. Tip & Shaft y était et vous en dit un peu plus.
- Monocoque ET multicoque : à l’issue d’un suspense savamment entretenu, Mark Turner, CEO de la la Volvo Ocean Race a donc dévoilé le choix du support des prochaines éditions du tour du monde en équipage. Ce sera un monocoque sur plan Verdier de 60 pieds à foils pour les épreuves offshore et un catamaran entre 32 et 50 pieds pour les épreuves inshore (qui va faire l’objet d’un nouvel appel d’offres architectural). Même si la conversion à un projet 100% multicoque semble ne pas avoir eu de véritables chances de voir le jour, les propriétaires de la course, aiguillonnés par le PDG qu’ils ont nommé voilà un an, ont probablement pris conscience que c’était une voie d’avenir et que, tôt ou tard, ils y passeraient. En ce sens, et bien au-delà du buzz et de l’opération de com minutieusement orchestrée, c’est sans doute la principale avancée de Mark Turner, qui avait bien compris qu’il était encore un peu tôt pour convaincre les différentes parties : laisser les teams pionniers en Ultime développer leurs machines – et, en particulier effectuer un premier tour du monde en course en 2019 – avant de choisir le support une fois qu’il sera abouti. Entre-temps, les équipes qui participeront à la Volvo Ocean Race devront se mettre au multlcoque, puisque les teams ne pourront embaucher des équipiers spécialisés pour les in-port (sauf peut-être un marin). D’autant que, même si les épreuves offshore resteront le coeur de la course, les points des épreuves inshore seront revalorisés.
- Une plateforme compatible Imoca : comme Tip & Shaft vous l’a révélé très tôt, la “compatibilité Imoca” du nouveau VO60 était l’une des options du cahier des charges que l’organisateur avait soumis aux architectes sollicités. Et, si la plupart d’entre eux n’y étaient guère favorables, ce n’est pas le cas de Guillaume Verdier, sélectionné par la Volvo Ocean Race pour dessiner son nouveau monotype. Présent à Göteborg, ce dernier ne faisait pas mystère de la “convergence” entre des Imoca qui se sont alourdis pour tenir le choc des navigations sous foils et des VO60 qui vont s’alléger pour pouvoir “voler”. Car le détail n’aura pas échappé aux spécialistes : les safrans des VO60 seront équipés de plans porteurs tout juste interdits par la nouvelle jauge Imoca… Le membre du design team d’Emirates Team New Zealand est donc bien décidé à dessiner un VO60 qui pourra être performant sur le parcours du Vendée. De son côté, Mark Turner considère que, quitte à rester en monocoque, il serait dommage de se priver de l’opportunité de “connecter les deux écosystèmes” au prix de quelques ajustements techniques. “C’est juste une opportunité, ni plus, ni moins, il n’y a aucune volonté chez nous d’imposer la monotypie sur le Vendée Globe ou quelque chose comme ça“, tient-il à faire savoir. L’idée, en gros, est qu’un VO60, dont la coque sera à la jauge Imoca, puisse s’aligner sur le Vendée Globe moyennant une enveloppe de reconfiguration (nouveaux appendices, mâts, voiles + modifications du cockpit) aux alentours de 500 000 euros. La Volvo Ocean Race, qui sera propriétaire des 8 bateaux commandés auprès du chantier italien Persico (qui devra faire appel à des sous-traitants vu le volume de la commande), laissera d’ailleurs ce dernier construire des Imoca dans le moule du VO60 si la demande est là. L’investissement total de Volvo pour ces nouveaux bateaux (monos + multis) représente environ… 50 millions d’euros.
- Une Volvo Ocean Race tous les deux ans ? Le changement de cycle de la course – déjà passé d’un rythme quadriennal à rythme triennal – n’est pas acté officiellement, mais il est très sérieusement dans l’air, on en saura plus dans les prochaines semaines. Là aussi, Mark Turner l’avait évoqué à Tip & Shaft lors du départ du Vendée Globe : “Entre chaque édition, on a une année où il ne se passe rien sur l’eau, c’est long pour les sponsors.” Une intensification qui permettrait de proposer de l’activité tous les ans et d’aller toucher tous les marchés régulièrement, mais pas forcément à chaque fois. D’où les différentes réflexions autour des parcours présentées à Göteborg, avec des tours du monde au départ des différents continents, des tours de l’Antarctique non-stop suivis ou précédés de sauts de puce dans des grandes capitales… dans l’esprit de Mark Turner, le temps des tours du monde “standards” au départ et à l’arrivée en Europe semble avoir vécu.
- Du Figaro à la Volvo Ocean Race. Fin connaisseur de la voile hexagonale – ce qui interroge parfois en interne – Mark Turner plaide depuis longtemps en faveur de la pyramide française des supports, jusqu’à projeter dans une slide lors de sa présentation en Suède l’illustration du “french sailing ecosystem“. En s’associant avec World Sailing pour lancer des Volvo Academies partout dans le monde pour former les jeunes marins qui n’ont pas de support pour apprendre le large en sortant de la voile légère, la Volvo Ocean Race cherche à répliquer cette filière de formation. Et devinez sur quel bateau ? Des Figaros, pardi ! Un mouvement à rapprocher du projet poussé par la fédération internationale de voile de proposer une épreuve de course au large, que Tip & Shaft vous a dévoilé en février. Interrogé en marge de la présentation, Kim Andersen, le président de World Sailing nous a confirmé que la proposition franchissait les obstacles les uns après les autres et que le CIO s’était montré très intéressé. “Mais rien n’est fait, vraiment. Nous aurons la réponse début juillet.“
La semaine a été riche en annonces puisque Dongfeng et AkzoNobel ont présenté leurs équipages au complet et qu’une cinquième équipe hongkongaise a été annoncée. Quid des autres ? Un sixième team se dévoilera très prochainement et Mark Turner a très bon espoir de monter un équipage de jeunes marins, entièrement mixte, pour porter la nouvelle stratégie de développement durable annoncée à Göteborg. Quant à un éventuel huitième engagé, “tout peut arriver” : le bateau est prêt et il est possible de s’engager tardivement, “grâce à la monotypie”, souligne Turner.