Dimanche a été donné le départ de la Le Havre Allmer Cup, deuxième épreuve de la saison du championnat de France Elite de course au large, dont la direction de course est assurée cette année par Yann Chateau. L’occasion pour Tip & Shaft de s’intéresser au parcours de celui qui prend, sur cette épreuve et sur la prochaine Solitaire du Figaro, la relève de Francis Le Goff.
Yann Chateau étrennera ses galons de directeur de course sur le circuit Figaro Beneteau lors de la Le Havre All Mer Cup. La suite presque logique du parcours de ce Normand de 43 ans, d’abord et avant tout régatier accompli qui cumule, entre autres, un titre de champion d’Europe de match racing et douze podiums aux championnats de France.
Avant d’en arriver là, celui qui a découvert la voile très jeune sur les bords de la Seine, dans l’agglomération rouennaise, est passé, aux côtés de son frère aîné Cédric – directeur sportif du Normandy Elite Team et engagé sur le circuit Class40 -, par nombre de supports en double : Equipe, 420, 470 et 49er. Bac en poche, il s’inscrit en fac de sport afin de bénéficier d’un emploi du temps aménagé.
Il se plonge dans le même temps dans la formation des jeunes au sein du club de voile de Saint-Aubin-Elbeuf – où il est toujours licencié – et de la Ligue de voile de Normandie, au Havre, qu’il rejoint chaque week-end. Il coache notamment, avec Cédric, un ado de 14 ans, Charlie Dalin, qui se souvient : “Je venais de commencer le 420 au pôle d’entraînement du Havre. Je n’arrivais pas à trouver les bons réglages au largue dans la brise. Yann a remplacé mon équipier. Il était hyper dynamique au trapèze. On a fait un bord magique. Il fait partie de ceux qui m’ont aidé à grandir en dériveur. Plus tard, il a aussi été pas mal présent avec le groupe du projet Normandy Elite Team lancé en 2014 par Francis Le Goff pour aider les jeunes régatiers à progresser.”
“J’ai vraiment découvert l’univers de la structuration sportive au sein de mon petit club de plan d’eau intérieur, champion de France des clubs en 2011, explique de son côté Yann Chateau. Parallèlement, j’ai vite évolué avec un mi-temps à la ligue, toujours très active en matière d’événements. J’ai pris part à ceux organisés sur le territoire, où le côté technique des choses m’a tout de suite plu.”
Francis Le Goff
lui a passé la barre
Le régatier découvre également la compétition semi-hauturière en Mumm 30, participant en 2004 à son premier Tour de France à la Voile. “C’est sur cette épreuve, que j’ai disputée cinq fois, que j’ai commencé à goûter aux différentes facettes de la course au large, comme le routage météo“, complète Yann. Un domaine auquel cet amateur de mathématiques et féru d’informatique se forme en autodidacte, se nourrissant de ses échanges avec les spécialistes croisés au fil de son parcours.
Devenu un directeur de course reconnu, Francis Le Goff fait alors régulièrement appel aux compétences de Yann Chateau pour l’intégrer dans ses équipes assurant la logistique en mer. Des missions qui lui ont permis de se former à la direction de course. “Son évolution vers la DC est le fruit d’un long processus, que j’ai moi-même connu après avoir accompagné Sylvie Viant puis Jean Maurel, qui m’a poussé à franchir le pas, et Gilles Chiorri, auprès duquel j’ai beaucoup appris. Il faut du temps pour assurer la relève à ce poste central et complexe,” explique l’actuel directeur de course de la Vendée Arctique-Les Sables et de la Route du Rhum-Destination Guadeloupe.
Lequel n’a pas hésité, lors de la dernière Solitaire du Figaro, à renforcer son dispositif afin d’embarquer son adjoint, habituellement à terre, sur le bateau suiveur de la direction de course. “Après une phase d’observation et de partage du travail, j’ai rongé mon frein pour lui laisser entièrement la main sur la quatrième étape, du briefing aux vacations, même si je restais le responsable de l’épreuve”, raconte Francis Le Goff.
“Un touche-à-tout doté
d’un sang-froid à toute épreuve”
Dans cette même logique de transmission, Yann Chateau sera désormais épaulé par Pierre Hays, cadre technique de la Vague Normande (le nouveau nom de la ligue), qui s’apprête, à 32 ans, à endosser à terre le rôle de directeur de course adjoint sur la Solitaire. “Avec Yann, on est très complémentaires. Je suis sur la sécurité du plan d’eau, la gestion des départs et des arrivées. Il est plus sur la météo, les textes officiels et la définition du parcours. Son côté geek fait qu’il sait aussi mettre en place des outils adaptés à la fonction“.
Yann Chateau officie pour l’instant sous dérogation, puisqu’il ne figure pas encore dans la liste des directeurs de course homologués de la Fédération française de voile – il devrait être habilité en catégorie B au terme de la prochaine Solitaire du Figaro (voir notre article sur le sujet). Mais Charlie Dalin a peu de doutes sur ses capacités à s’affirmer dans ce rôle exposé : “C’est un touche-à-tout doté d’un sang-froid à toute épreuve.”
Vainqueur de la dernière édition de la Solitaire, Pierre Quiroga ajoute : “Je crois qu’il aime autant être sur l’eau en compétition, où je l’ai croisé quand j’ai tiré mes premiers bords en match racing, que dans les coulisses.” Car même si la direction de course prend de plus en plus d’importance dans son emploi du temps, le Normand continue à régater : en match racing avec Maxime Mesnil, avec lequel il disputera le championnat d’Europe en juin prochain, mais également en maxi au sein de l’équipage du nouveau Wally du Paprec Sailing Team. Histoire de “toujours rester au goût du jour pour tout ce qui a trait aux centrales de navigation et aux nouveaux outils d’aide à la performance.”
Photo : Alexis Courcoux