A 42 ans, le directeur général des Treilles Gourmandes, amateur de voile depuis toujours, n’est pas un expert de la course ; sa spécialité, c’est plutôt le canard sous toutes ses formes, que l’entreprise familiale, installée près d’Angers, cuisine depuis 35 ans. Mais du foie gras – 300 tonnes produites par an – aux plats sous vide, il n’y a qu’un pas, franchi voilà plusieurs années. “On a commencé à passer aux sachets appertisés sur nos confits de canard, d’abord pour des raisons logistiques, se souvient-il : cela coûte moins cher que de transporter des bocaux en verre !”
Surtout, cette technique permet une cuisine de bien meilleure qualité : “Un emballage souple et notre processus de cuisson sous-vide donnent une viande cuite à coeur et des sauces réduites, sans être trop liées, précise Antoine Boucher. On ne met que la quantité nécessaire, à la différence des conserves et des bocaux.” Voilà comment l’entreprise spécialisée dans la transformation du canard se diversifie dans les recettes gastronomiques à emporter. Et lance, voilà 5 ans, sa marque spécialisée Le Bon Bag, épaulée par Franck Garanger, maître cuisinier de France et… chef d’une compagnie de croisière. “Avec lui, on a réappris à travailler le produit brut, sans conservateurs ajoutés, et à sortir des recettes classiques.”
Les marins – tels Jean Le Cam ou Louis Burton, ambassadeurs de la marque -, comprennent vite l’intérêt du produit, incomparablement meilleur que le fameux Lyophal : “Stockage à température ambiante, deux à trois ans de conservation et un simple bain-marie avec de l’eau de mer pour le réchauffer, résume Antoine Boucher. Vous pouvez en manger même en panne de dessalinisateur !“ A ce stade, on se permettra de livrer une anecdote personnelle : le souvenir ému des derniers milles d’une Route du Rhum, voila quelques années, et de l’atterrissage de nuit sur la Guadeloupe, en dégustant à 17 noeuds au portant une fricassée de volaille à l’angevine saveur truffe, sous pilote, GV 1 ris et spi médium arisé….
“En course, l’avitaillement-type désormais c’est moitié lyophal, moitié stérilisé, explique Ariane Pehrson, la fondatrice de Lyophilisé & Co., spécialiste incontournable de la nourriture outdoor. Désormais la qualité prend le dessus sur le poids.” Les best-sellers du catalogue ? Le boeuf carotte, le cassoulet au confit de canard et la choucroute de canard au Riesling. “Ce sont des super produits, made in France, on est proche de ce qu’on peut manger chez soi, pour les marins, il faut juste rajouter les féculents“, souligne Ariane. Au point que Le Bon Bag, qui vend 100 000 sachets par an, compte parmi ses clients… de nombreux restaurants. “Voilà pourquoi on a des portions de restauration“, reconnaît en souriant Antoine Boucher.
A un peu plus de 4 mois du Vendée Globe, le boss du Bon Bag travaille de nouvelles recettes : “C’est la période des écrevisses, je suis bien tenté par poulet sauce Nantua !” Il a également promis à Jean Le Cam de le fournir en ris de veau. Et réfléchit toujours à optimiser ses produits : “Avant, pour mon rougail, j’achetais de la saucisse toute faite ; maintenant la saucisse du rougail, c’est moi qui la fait“. Cet hiver, dans le grand Sud, quelques marins s’en souviendront.