C’est un équipement stratégique pour les marins en solitaire : au fil des innovations, le pilote automatique est devenu un produit extrêmement sophistiqué, qu’une poignée d’acteurs est capable de concevoir et de mettre au point.
Sur ce marché très concurrentiel, Madintec, une start up rochelaise créée en 2012, a réussi en quelques années à se faire sa place. Au point d’équiper aujourd’hui 9 des 33 bateaux qui se sont élancés sur le Vendée Globe – dont quelques gros calibres comme PRB, Initiatives Coeur, Apivia, LinkedOut et Arkéa Paprec – ainsi que quatre Ultimes et quatre Multi50. L’entreprise, présente également à Lorient, vise désormais le marché des Class40 où elle souhaite déployer MADbrain, sa solution de pilote automatique.
Fondée par deux ingénieurs issus de la Coupe de l’America, Matthieu Robert et David Cesari, Madintec fournissait à l’origine les centrales de navigation Bravo, connues pour la qualité de leur mesure du vent réel. Elle a opéré un virage stratégique en 2016 : “Nous étions frustrés de travailler avec des pilotes qui n’étaient pas les nôtres, nous avons donc décidé de développer notre propre produit en partant de zéro, explique Matthieu Robert. Avec un cahier des charges qui tient en trois mots : simplicité, fiabilité et performance.”
Après une levée de fonds, Madintec étoffe son équipe – 10 personnes aujourd’hui, en majorité développeurs, ingénieurs et docteurs – et met en place une stratégie précise. Dans chaque classe est noué un partenariat avec un skipper pour élaborer un pilote sur mesure, paramétré en fonction des spécificités des bateaux de la classe. François Gabart en Ultime, Lalou Roucayrol en Multi50 et Sam Davies en Imoca ont ainsi été les premiers à être équipés du pilote Madintec.
En Class40, c’est Ian Lipinski qui teste, depuis la mise à l’eau de son plan David Raison Crédit Mutuel, en septembre 2019, la solution développée spécialement pour les monocoques de 40 pieds. Le double vainqueur de la Mini-Transat s’avoue bluffé : “Je n’ai jamais eu de pilote aussi performant entre les mains. Dès la Transat Jacques Vabre [qu’il a remportée, NDLR], il barrait bien, notamment grâce à des modes de fonctionnement hyper intuitifs, très proches de la manière de se comporter d’un skipper, en particulier lorsque le bateau gîte. Aujourd’hui, dans 90% des cas, le pilote barre mieux que moi, et, surtout, il fait très peu d’erreurs.”
Une efficacité qui est le fruit de nouveaux algorithmes et de la puissance de calcul importante développés par Madintec. “Nos pilotes ont une précision du touché de barre au dixième de degré près, alors qu’en général, c’est de l’ordre de 0,7 à 1 degré, explique Hugo Kerhascoët, le directeur scientifique. L’autre atout, ce sont les modes de “supervision” qui permettent au pilote de s’écarter des consignes traditionnelles de cap et d’angle de vent réel pour prendre en compte d’autres critères importants pour la performance comme la gîte, le vent apparent et la vitesse par exemple, et privilégier ainsi le rapprochement vers l’objectif.”
Le nouveau pilote destiné aux Class40, disponible au premier trimestre 2021, bénéficie de deux innovations supplémentaires. “D’abord l’intégration de la centrale de navigation et du pilote dans le même boîtier, avec un nouveau processeur quatre fois plus rapide que celui des Imoca actuels”, annonce Benoît Piquemal, le directeur technique de Madintec, passé par le Gitana Team et MerConcept. Ensuite les premières calibrations de la centrale – indispensables à la bonne conduite du pilote – seront incluses dans le pack : “On ne fait pas que vendre une boîte, on propose un service intégré”. Prochains Class40 équipés : ceux d’Antoine Carpentier et d’Axel Tréhin.
Photo : Breschi / Crédit Mutuel