Deuxièmes de la Transat Jacques Vabre Normandie-Le Havre en Ultim, François Gabart et Tom Laperche étaient équipés à bord de SVR Lazartigue d’un vérin de pilote automatique baptisé Mobius L300-700, conçu et assemblé en France. Un produit imaginé par un ingénieur passionné de voile, Paul-Louis Defrétière, qui, après des études à l’Ecole nationale supérieure d’Arts et Métiers, à Paris, s’est très vite plongé dans cet univers via des stages au sein du Safran Sailing Team de Marc Guillemot puis du défi américain Oracle pour la 35e Coupe de l’America en 2017.
A son retour en France, Paul-Louis Defrétière commence à dessiner “son” vérin de pilote dédié à la course au large. “J’ai toujours été passionné par la mécanique des bateaux. En travaillant avec Safran, j’ai constaté que si le vérin fonctionnait, il n’était plus adapté à l’utilisation qu’on en faisait. C’était le moment de proposer quelque chose de nouveau.”
L’appel de la Coupe l’empêche d’aller plus loin, puisqu’il intègre le défi American Magic pour la 36e édition, au sein du département systèmes dirigé par Dimitri Despierres. Ce qui permet à l’ingénieur de parfaire ses connaissances sur les vérins et renforce sa volonté de concevoir son propre produit.
La Coupe terminée, il monte ainsi sa structure, Mobius France, et met au point son prototype pendant la période Covid. Sa particularité ? “Jusqu’ici les clients avaient le choix entre un vérin électrique rapide mais pas très costaud et un vérin hydraulique costaud mais très lent et énergivore. Nous avons développé un actionneur électrique deux fois et demi plus rapide que la solution électrique de référence et deux fois plus costaud que le vérin hydraulique le plus commun du marché, le tout dans une enveloppe de masse intermédiaire entre les deux solutions.”
Avant de le lancer sur le marché, Paul-Louis Defrétière se met en quête d’un team pour le valider en course. Par l’intermédiaire d’Arthur Le Vaillant, dont il est très ami, il se rapproche de l’équipe SVR Lazartigue qu’il parvient à convaincre d’utiliser le Mobius L300-700 sur l’Ultim de François Gabart. “Les caractéristiques de ce vérin nous semblaient intéressantes, explique ce dernier. Par ailleurs, on voyait beaucoup de développements possibles dans les années à venir avec Mobius. C’était donc une belle opportunité de progresser dans ce domaine.”
La phase de validation débute à la remise à l’eau de SVR Lazartigue fin mai 2023, les résultats sont vite concluants, entre victoire sur le Fastnet en juillet et deuxième place sur la Jacques Vabre, mais surtout satisfecit du client : “Nous avons parcouru beaucoup de milles avec ce vérin et le bilan est très positif en termes de fiabilité, tout a fonctionné sans accroc, confirme François Gabart. Nous observons également un gain en performances : le vérin apporte davantage de précision et de contrôle, il fait aussi réagir le système de barre global de manière plus rapide, sans consommation d’énergie supplémentaire. On peut explorer des subtilités de pilotage sur lesquelles on n’était pas forcément attentifs auparavant.”
Fort de cet essai transformé, Paul-Louis Defrétière souhaite désormais proposer son Mobius L300-700 à d’autres équipes de course au large, en Ocean Fifty, Imoca et Ultim. “Maintenant que le produit a été testé et approuvé, ce n’est plus un prototype, souligne-t-il. Nous lançons sa production avec l’objectif de baisser le prix, un vrai défi quand on fabrique en France. Il est compatible avec les différentes marques d’électronique du marché.”
Le fondateur de Mobius France voit même plus loin : “À moyen terme, nous envisageons de lancer des vérins de pilote pour des plus petits bateaux, comme les Class40, mais aussi des vérins destinés à d’autres fonctions du bord.”
Photo : Gauthier Lebec / Mobius France