Pas de répit pour Amélie Grassi. La navigatrice de 29 ans enchaîne les courses et les expériences sur différents supports : après The Ocean Race sur Biotherm et le Tour de Bretagne à la Voile en Figaro avec Anne-Claire Le Berre, elle poursuit sa saison sur son Class40 La Boulangère Bio. Deux jours avant le départ du Fastnet, qui s’élancera du Solent ce 22 juillet, Amélie a pris le temps de répondre aux questions de Tip & Shaft.
J’ai adoré ! C’était assez cocasse de se retrouver à Alicante pour un départ de tour du monde avec un équipage [composé du skipper Paul Meilhat, d’Anthony Marchand et de Damien Seguin, NDLR] qui ne se connaissait quasiment pas et n’avait jamais navigué ensemble. Mais la prise en main a été rapide et efficace. Il y avait une bonne dynamique avec des tempéraments de compétiteurs, assez apaisés et faciles dans l’échange et le travail en équipage. J’ai beaucoup aimé l’arrivée à Cape Town quand on s’est emparé de la deuxième place. C’était une belle récompense après une étape particulièrement longue.
J’ai beaucoup aimé la machine, les sensations de vol et de vitesse sont très grisantes, très addictives. Technologiquement, c’était aussi très intéressant. Nous n’avions pas de vérités sur l’utilisation du bateau, très récent, alors nous étions tous sollicités pour tenter des choses et mieux l’exploiter. Et ça c’était génial. C’était aussi une très belle opportunité car j’aimerais bien poursuivre un jour en Imoca. Découvrir ce support en équipage était royal car cela permet de pousser plus le bateau, et donc d’apprendre beaucoup.
“Notre fonctionnement est beaucoup plus fluide après le Tour de Bretagne”
► Début juillet, tu as enchaîné avec le Tour de Bretagne en Figaro avec Anne-Claire Le Berre. Ce n’était pas prévu au programme. Comment est né ce projet ?
À la base nous devions courir Les Sables-Horta-Les Sables, mais mon Class40 La Boulangère Bio a dû passer en chantier pour un problème de quille. Avec Anne-Claire, nous ne souhaitions pas rester à quai pour autant. Et c’est au cours d’une discussion à bord de Biotherm que l’idée du Tour de Bretagne a émergé. Alan Roberts, qui était à bord, m’a proposé son Figaro. J’ai alors appelé Bessé Conseil en Assurances, la première boîte qui m’avait soutenue en Mini 6,50. Et ils étaient partants. Au lieu d’aller s’entraîner contre nous-mêmes à Lorient, on a pu se confronter à un plateau de figaristes au niveau très élevé, c’était parfait !
► Vous montez sur la troisième marche du podium lors de la première étape et terminez 9e au classement général… Contente du résultat ?
Oui, très ! Surtout que nous n’avions navigué que deux fois sur le bateau avant le départ. Et puis notre objectif n’était pas de faire du résultat mais plutôt de travailler sur notre binôme, de devenir plus efficaces dans nos échanges et de prendre les bonnes décisions plus rapidement. Le bilan est positif car notre fonctionnement était beaucoup plus fluide à l’arrivée. Et cela va bien nous aider pour la Transat Jacques Vabre.
► Vous naviguez ensemble depuis 2021 et votre duo semble bien organisé. Que vous apportez-vous l’une l’autre ?
On est assez complémentaires. Anne-Claire barre pas mal, notamment sur les phases de contact, et moi je gère les manœuvres et la tactique. Quand on est plus au large, on arrive à bien échanger et on prend généralement les décisions ensemble. Garder la motivation, être positives, c’est notre force de notre duo. On ne lâche jamais rien.
“Sur la Jacques Vabre,
on vise le Top 5, voire le podium”
Le rythme est intense ! J’ai réussi à me prendre deux semaines et demie de pause au mois d’avril. Ça m’a bien rechargé en énergie. Et là, même si ça commence à tirer, j’ai toujours autant envie de naviguer, donc ça va. C’est une année hyper stimulante, je progresse beaucoup, je rencontre plein de gens, je découvre de nouveaux supports, je m’éclate. Mais après le Fastnet ça va quand même me faire du bien de faire un gros break de trois semaines afin d’être en forme pour la Transat Jacques Vabre.
Sur le Fastnet, l’objectif est de boucler la course afin de se qualifier pour la Jacques Vabre. On va aussi tester le bateau avec son nouveau mât [le bateau avait démâté lors de la Route du Rhum, NDLR] et toutes les nouvelles petites modifications que nous avons apportées. Sur la Jacques Vabre, on vise le top 5, voire le podium. Malgré les aléas techniques, on a construit un programme d’entraînements fiable sur l’année. J’espère que l’on arrivera suffisamment solides pour faire face à un niveau de jeu qui s’est beaucoup élevé ces dernières années en Class40. On doit être une bonne vingtaine d’équipages à pouvoir prétendre à un podium.► Quelles sont tes perspectives et tes envies sur le long terme ?
Mon contrat en Class40 avec La Boulangère Bio se termine en 2024. Au programme, on aura notamment la Transat anglaise et la Transat Québec-Saint-Malo. Pour la suite, il n’y a rien de déterminé. Mais j’ai pas mal d’envies qui s’entrechoquent. J’ai un bon appétit pour l’Imoca et le Vendée Globe. Et en même temps j’aimerais bien continuer à naviguer en Ultim sur Actual, un bateau sur lequel j’adore la gestion du risque, la vitesse… Mais je ne suis pas non plus pressée de passer à autre chose car j’apprécie beaucoup le plateau en Class40. Je suis jeune et tant que je suis sur l’eau, j’apprends plein de trucs et je prends du plaisir. Alors je verrai en fonction des opportunités qui se dessinent.
Photo : Julien Champolion / polaRYSE