La France a ouvert vendredi son compteur de médailles olympiques, avec le bronze en 49er FX pour Charline Picon et Sarah Steyaert, le titre revenant aux Néerlandaises Odile Van Aanholt et Annette Duetz devant les Suédoises Vilma Bobeck et Rebecca Netzler. Déception en revanche pour Nicolas Goyard (15e en iQFoil)et le duo Erwan Fischer/Clément Péquin (12e en 49er), tandis qu’Hélène Noesmoen est encore en course pour la médaille en iQFoil. Le point sur la première semaine des JO avec Guillaume Chiellino, directeur technique national de la Fédération française de voile.
▶︎ Commençons par cette médaille de bronze en 49er FX, t’attendais-tu à un tel résultat ?
Sur le papier, cela s’annonçait difficile, Charline et Sarah étaient clairement outsiders et avaient des adversaires très fortes. Mais compte tenu de leur expérience passée, on savait qu’elles pouvaient jouer leur carte à fond. Elles ont été d’une fiabilité incroyable et ont réussi à aller chercher ce podium, c’est merveilleux ! Elles se sont appuyées sur leurs atouts qui sont l’expérience et la culture de la gagne, Charline étant déjà médaillée d’or aux JO de 2016 et d’argent aux JO de 2020 en RS:X et Sarah championne du monde de Laser Radial en 2008.
▶︎ Si Charline Picon et Sarah Steyaert étaient surtout attendues pour performer dans des conditions légères, elles ont aussi assuré dans des conditions plus musclées. Pouvez-vous revenir sur ces cinq jours de course ?
Sur les six premières courses, qui se sont disputées dans des conditions plutôt légères, elles font clairement un parcours sans faute. Ensuite, grâce à leur force mentale, elles ont réussi à s’accrocher quand il y avait un peu plus de vent. Lors de la 12e course, mercredi, elles ont notamment brillamment réussi à résister à la pression, contrairement à leurs adversaires, ce qui leur a permis d’arriver en tête au général avant la Medal Race d’aujourd’hui. Sur cette finale, elles sont parties un peu moins bien que leurs adversaires, l’enjeu était donc de s’accrocher, ce qu’elles ont fait. C’est clair qu’on a vibré et on a eu peur, il y a notamment eu de la confusion sur le dernier bord avec des erreurs de parcours des Néerlandaises, mais Charline et Sarah ont joué jusqu’au bout et le résultat est là !
▶︎ Que t’inspire le défi que se sont lancé ces deux navigatrices qui venaient d’autres supports et avaient moins de trois ans pour préparer ces Jeux Olympiques ?
C’est vrai que de l’extérieur, le pari pouvait paraître un peu fou. Mais à la direction technique, c’est un projet auquel on croyait compte tenu de leur expérience, qui compte énormément dans notre sport, mais aussi de leur pugnacité et de leur envie de se battre et de gagner. Mi-mai, en devenant vice-championnes d’Europe, elles avaient d’ailleurs déjà montré qu’elles pouvaient performer dans des conditions de petit temps. Elles ont un parcours incroyable. Et pour l’histoire de notre sport, c’est juste extraordinaire de montrer que l’on peut changer de support – Charline naviguait auparavant en planche à voile et Sarah en ILCA 6 -, être mamans et décrocher une médaille de bronze !
“Nicolas n’a pas réussi
à rentrer dans sa compétition”
▶︎ En 49er, quel regard portez-vous sur les jeux du duo Erwan Fischer/Clément Péquin, qui termine à la 12e place, après avoir été sacré champion du monde cette année ?
On est tous déçus, eux les premiers. C’est difficile. Erwan et Clément vont extrêmement vite à partir de 10-12 nœuds, des conditions que nous n’avons pas toujours eues. Et ils n’ont pas été très bons sur les départs. Sur une petite flotte de 20 bateaux comme celle-ci, si l’on ne part pas devant, c’est un peu dur pour rattraper le retard. Avec Philippe Mourniac, le directeur de l’équipe de France, et Françoise Le Courtois, leur entraîneur, ils ont essayé, chaque jour, de chercher des solutions, mais ne les ont malheureusement pas trouvées. C’est la difficulté de notre sport, on sait que la performance n’est pas garantie.
▶︎ Même chose pour Nicolas Goyard en iQFoil, qui a terminé 15e. Comment analysez-vous sa semaine ?
Il n’a pas réussi à rentrer dans sa compétition et nous n’avons pas trouvé les clés pour le remettre dedans. Il a fait quelques erreurs techniques en chutant notamment deux fois jeudi. Pas mal de petits moins qui font qu’il n’a pas pu décrocher son ticket pour la finale, à l’inverse d’Hélène Noesmoen, qui courra en quarts de finale demain [la phase finale, qui devait initialement se courir ce vendredi a été reportée faute de vent]. Malgré ces déceptions, l’ambiance est franchement au beau fixe au sein de l’équipe, les athlètes sont tournés vers la performance collective et se mettent au service des autres, c’est très beau à voir.
▶︎ Quel regard portes-tu sur les premières manches de Louise Cervera (ILCA 6) et de Jean-Baptiste Bernaz (ILCA 7) qui ont commencé, ainsi que sur celles de Camille Lecointre et Jérémie Mion (470 mixte) qui sont entrés en lice aujourd’hui ?
Hier, Louise a terminé en tête de la première manche. C’est toujours bien de gagner une course, mais c’est le tout début de la compétition, et aujourd’hui, elle a fait un peu moins bien sur la deuxième manche (24e, puis 4e sur la troisième manche). Quant à JB, il vient de terminer 5e de la troisième manche (après deux manches en 8e et 19e position). Ils sont dans le match ! Louise est brillante dans les petits airs et JB est bon dans toutes les conditions. Demain, ils annoncent un peu de vent donc espérons que la variété des conditions puisse bien réussir à JB, qui est en tout cas bien rentré dans ses Jeux. Quant à Camille et Jérémie, c’est le grand début aujourd’hui, ils sont prêts et ont envie d’en découdre. Ils terminent 11e et 10e de leurs deux premières manches aujourd’hui.
▶︎ Un mot sur l’entrée en lice, dimanche, des kitesurfeurs Lauriane Nolot et Axel Mazella, tous deux favoris pour décrocher une médaille?
Ils sont vraiment bien préparés pour ces jeux. Lauriane a tout gagné donc elle est dans la peau d’une favorite, ce qui n’est jamais forcément évident, mais elle a l’air très bien dans ce costume-là. Et dans le groupe d’Axel, ils sont 4-5 à pouvoir faire un podium avec comme grand favori le Singapourien Maximilian Maeder. Donc l’objectif pour lui sera de se battre pour aller le chercher et bien sûr viser un podium.
▶︎ Pour finir, que dire de l’ambiance à terre, qui a l’air incroyable?
Il y a une très belle ferveur autour de notre sport et de l’équipe de France, ce qui est génial pour la voile. Si notre référence était jusqu’à maintenant les Jeux de 2012 à Londres, là, l’ambiance est clairement plus belle, avec encore plus de supporters. Plus de 10 000 personnes viennent chaque jour dans l’espace spectateurs, quand d’autres regardent les courses depuis la Corniche, c’est vraiment une grande fête de notre sport. Il y a un fort soutien auprès de nos athlètes et une foule en délire, chaque jour, quand ils arrivent ou sortent de la marina, c’est assez exceptionnel.
Photo : Sailing Energy